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Supreme Court of Canada

La Ville de Jacques-Cartier v. Lamarre, [1958] S.C.R. 108

Date: 1957-12-19

La Ville De Jacques-Cartier (Plaintiff) Appellant;

and

Joseph Napoleon B. Lamarre (Defendant) Respondent.

Statutes—Operation—Effect of legislation limiting right of appeal—Jurisdiction of Court of Appeal of Quebec—Expropriation—Code of Civil Procedure, art. 1066k.

The right of appeal is a substantive right and not merely a matter of procedure, and a statute limiting an existing right of appeal has no application in an action instituted before its enactment, unless a contrary intention is expressly stated or necessarily implied. Williams et al. v. Irvine (1893), 22 S.C.R. 108; Hyde v. Lindsay (1898), 29 S.C.R. 99, applied.

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Since, in enacting art. 1066k of the Code of Civil Procedure, in 1952, the Legislature did not manifest any intention to make it retroactive, the right of appeal in an expropriation case started in 1950 must be based on art. 1066k as it was enacted in 1940 by 4 Geo. VI, c. 71, s. 1.

APPEAL from a judgment of the Court of Queen's Bench, Appeal Side, Province of Quebec1, dismissing, for lack of jurisdiction, an appeal from a judgment homologating a decision of the Public Service Board in an expropriation matter. Appeal allowed.

E. Brais, Q.C., for the plaintiff, appellant.

F. Chaussé, the defendant, respondent.

The judgment of the Court was delivered by

Fauteux J.:—Les faits et procédures conduisant à cet appel peuvent se résumer comme suit:

En juin 1950, l'appelante, ci-après également appelée la Cité, adoptait un règlement autorisant son conseil à acquérir, de gré à gré ou par voie d'expropriation si nécessaire, le terrain de diverses rues projetées ou rues déjà ouvertes à la circulation par les propriétaires de certaines terres subdivisées par eux pour fins de lotissement. Suivant la loi qui la régit, soit l'art. 608 a de la Loi des Cités et Villes adopté en 1948 par la Loi 12 Geo. VI, c. 74, art. 6, aucune indemnité n'est payable par la Cité pour l'acquisition d'un terrain que le propriétaire d'une subdivision a, suivant les plan et livre de renvoi déposés au bureau d'enregistrement, destiné à l'établissement ou l'élargissement d'une rue ou ruelle. De ce chef, la Cité considéra qu'elle ne devait rien payer pour le terrain lui-même. Quant aux améliorations faites sur icelui, soit travaux de voirie, d'égouttement ou autres, le conseil, ainsi qu'il appert au règlement, fut d'avis qu'elles n'avaient aucune valeur commerciale, que le coût en était inclus dans le prix des lots desservis ou chargés à leurs nouveaux propriétaires et que ne pouvant ni physiquement ni légalement être séparées du terrain, elles étaient, comme le terrain lui-même, couvertes par la disposition précitée. Aussi bien et à l'égard de ces améliorations spécifia-t-on au règlement qu'aucune indemnité ne serait payée dans le cas d'une acquisition faite de gré à gré, mais que, dans ceux où il serait nécessaire de procéder par voie

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d'expropriation, le conseil, sans préjudice au droit de faire valoir ses prétentions, offrirait le montant déterminé par son expert et paierait l'indemnité fixée par l'autorité judiciaire.

A la suite de ce règlement, soit le 17 août 1950, la Cité fit signifier à l'intimé, l'un des propriétaires concernés, un avis d'expropriation l'informant qu'il n'avait droit à aucune indemnité pour le terrain et offrant, sans préjudice au droit de faire valoir en justice ses prétentions "et conditionnellement pour le cas seulement où le juge, le tribunal ou la Régie des services publics, selon le cas, en viendrait à la conclusion qu'il y a lieu de payer une indemnité", de lui payer pour ces améliorations les indemnités déterminées quant à chaque rue par l'évaluateur de la Cité et dont la somme s'établissait à $3,579.50. Par lettre en date du 28 août 1950, les procureurs de l'intimé informèrent celui de la Cité qu'ils avaient le même jour comparu pour l'intimé et que ce dernier, pour éviter une contestation, était disposé à recevoir le montant indiqué dans l'avis d'expropriation. Défaut de contester fut enregistré et, sur motion de l'appelante, l'affaire fut référée à la Régie par jugement de la Cour Supérieure. Après enquête, audition et prise en délibéré, le 12 mars 1952, la Régie rendit, le 4 février 1953, une ordonnance affirmant le droit de l'intimé à une indemnité pour ses améliorations et fixant le montant de cette indemnité à celui offert par l'appelante et accepté par l'intimé. Le 2 mars 1953, la Cour Supérieure, sur motion de l'intimé, homologuait la sentence de la Régie et condamnait l'appelante à payer $3,579.50 à titre d'indemnité pour les améliorations, avec, en plus, les frais d'une action de cette somme en Cour Supérieure.

Le 16 mars 1953, la Cité appela de ce jugement. La Cour d'Appel2, considérant qu'en droit les dispositions de l'art. 1066k du Code de procédure civile limitent le droit d'appel d'un expropriant au seul cas où l'indemnité accordée est d'au moins $1,000 supérieure à son offre et qu'en fait l'indemnité accordée en l'espèce correspondait exactement au montant de l'offre faite par la Cité, conclut qu'elle n'avait pas juridiction et rejeta l'appel. D'où le pourvoi devant cette Cour.

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La disposition sur laquelle s'est appuyée la Cour d'Appel pour conclure à une absence de juridiction se lit comme suit:

1066k. Le jugement homologuant la sentence est un jugement final de la Cour Supérieure. Il est susceptible d'appel à la Cour du Banc de la Reine, quant à l'exproprié, si l'indemnité accordée est inférieure d'au moins mille dollars au montant par lui réclamé, et, quant à l'expropriant, si l'indemnité accordée est d'au moins mille dollars supérieure à son offre.

Ce texte fut adopté par l'art. de la Loi 1-2 Eliz. II, c., sanctionnée le décembre, pour remplacer celui édicté par l'art. de la Loi 4 Geo. VI, c. 71, santionnée le 30 mai 1940, et statuant que:

1066k. Le jugement homologuant la sentence est un jugement final de la Cour Supérieure. Il est susceptible d'appel à la Cour du Banc du Roi si le montant en litige est d'au moins cinq cents dollars.

Ainsi appert-il que le droit d'appel en matière d'expropriation tel qu'il existait au moment de l'introduction de la présente instance, soit en août 1950, fut modifié et restreint alors que la cause était en délibéré devant la Régie. Et dès lors se présente la question de savoir si la Cour d'Appel devait appliquer la disposition nouvelle restreignant le droit d'appel édicté par la disposition ancienne, ou cette dernière. La jurisprudence sur le point précise que le droit d'appel est un droit substantif et non une simple matière de procédure et qu'une loi restreignant un droit d'appel préexistant est, à moins qu'une intention au contraire n'y soit manifestée de façon explicite ou nécessairement implicite, sans application à un jugement rendu dans une instance déjà introduite devant le tribunal inférieur lors de son adoption. Cette Cour en a ainsi décidé dans Williams et al. v. Irvine3; Hyde v. Lindsay4. Et s'appuyant, entre autres, sur ces deux décisions, la Cour du Banc du Roi exprima sur le point des vues identiques dans La Cie de chemin de fer Québec et Lac Saint-Jean v. Vallières5. La Législature n'ayant, dans le cas qui nous occupe, manifesté dans la loi nouvelle aucune intention d'y donner un effet rétroactif et l'introduction de l'instance, constituée d'après l'art. 1066d par la production de l'avis d'expropriation, ayant eu lieu en août 1950, il en résulte que c'est la loi d'alors, c'est-à-dire la loi ancienne, qui devait être appliquée. Dans cette situation, la Cour d'Appel avait donc juridiction

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puisque ce qui était en litige était le droit à une indemnité dont la mesure, déterminée par la Cité et acceptée par l'intimé, était de $3,579.50.

Ce motif du jugement a quo doit donc être écarté.

En plus de la question de juridiction, MM. les Juges McDougall et Hyde paraissent avoir considéré qu'en raison des termes de l'offre faite dans son avis d'expropriation, la Cité s'est liée à accepter comme finale la décision de première instance sur le point de droit donnant lieu au litige et qu'en conséquence, il ne lui était pas loisible de soumettre ce point à la considération de la Cour d'Appel. Étant d'avis qu'il convient de retourner le dossier à la Cour d'Appel, rien n'est dit sur ce point aussi bien que sur le pouvoir de la Cité ou l'autorité de son procureur de prendre une telle position dans l'avis d'expropriation. Ces questions, comme toutes autres pertinentes à la considération de l'appel, restent ouvertes.

Je maintiendrais l'appel et retournerais le dossier à la Cour d'Appel pour audition et adjudication en l'affaire; il n'y aura pas de frais devant cette Cour et la question des frais sur le premier appel à la Cour du Banc de la Reine sera déterminée par cette dernière Cour lors du jugement à être rendu par elle sur la présente référence.

Appeal allowed without costs.

Attorney for the plaintiff, appellant: E. Brais, Montreal.

Attorney for the defendant, respondent: F. Chaussé, Montreal.



1 [1956] Que. Q.B. 204.

2 [1956] Que. Q.B. 204.

3 (1893), 22 S.C.R. 108.

4 (1898), 29 S.C.R. 99.

5 (1913), 23 Que. K.B. 171.

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