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Supreme Court of Canada

Compagnie d'Entrepreneurs en Construction Ltée v. Simard, [1952] 2 S.C.R. 444

Date: 1952-10-07

La Compagnie d'entrepreneurs en Construction Limitée (Defendant) Appellant;

and

Jean Joseph Simard (Plaintiff) Respondent.

Contract—Sale of steam shovel without certificate of inspection—Whether sale null ab initio—Whether tender of certificate before judgment was sufficient—Pressure Vessels Act, R.S.Q. 1941, c. 177, s. 12, as amended.

By a written contract, the appellant sold to the respondent a used pressure vessel, namely, a steam shovel. Pursuant to its undertaking, the appellant made delivery at the respondent's sand pit. Subsequently, the respondent sought, by his action, the annulment of the sale on the ground that the shovel had been sold and delivered without the certificate mentioned in s. 12 of the Pressure Vessel Act (R.S.Q. 1941, c. 177 as amended), which provided that no such vessel "shall be again commercially dealt with for the purpose of being again used, before its owner has obtained from the chief inspector a certificate authorizing the use of the said vessel".

An offer to have the shovel inspected and the certificate delivered was made by the appellant before filing its plea and was renewed with the plea. On motion made by the appellant pursuant to Art. 392 C.P., two experts were appointed and reported that the certificate could be issued.

The action was maintained by the Superior Court and by a majority in the Court of Appeal for Quebec on the ground that the sale in violation of section 12 of the Act was absolutely null and could not be validated by the tender.

Held (Rand J. dissenting), that the appeal should be allowed and the action dismissed.

Per Rinfret C.J.: Section 12 of the Act deals only with commercial sales and not with a sale of the nature of the one in the present case. Furthermore, even if this were a commercial sale, the section is not aimed at the sale itself but at the delivery, and, therefore, at the most, there would have been a suspensive condition which would bring the case within the decision of Jean v. Gagnon ([1944] S.C.R. 175), since the certificate was tendered before judgment. But in fact, since the sale was not affected by the provisions of section 12, the delivery made satisfied all the obligations of the vendor towards the purchaser.

Per Taschereau, Estey and Fauteux JJ.: The word "owner'' in section 12 of the Act refers to the vendor and, in this case, he had the double obligation of delivering the shovel and of obtaining the certificate. Without the certificate, the shovel could not be commercially dealt with and its sale would be voidable. But since the vendor had

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tendered the certificate before judgment, he had discharged the obligation imposed by section 12 and the sale was, therefore, now complete.

Per Rand J. (dissenting) : Section 12 aims at furnishing the same security in second hand sales as in the case of new machines and applies to every stage of the sale from the contract to the delivery; and until the certificate is given, the vessel cannot be dealt with commercially and, therefore, the sale was null and void.

APPEAL from the judgment of the Court of King's Bench, appeal side, province of Quebec 1, affirming, Galipeault JJ.A. and Casey J.A. dissenting, the judgment of the Superior Court and holding that the sale of the steam shovel was null.

Roland Fradette, Q.C., for the appellant. Section 12 of the Pressure Vessels Act does not impose a prohibition which would render null and void the sale of the vessels mentioned therein. In any event, the disposition respecting the obligation to obtain the certificate, creates at the most a suspensive condition as regard the delivery of the vessel. The tender of the certificate was made before the plea to the merits (Jean v. Gagnon 2), and the suspensive condition was, therefore, fulfilled. Furthermore, even if the inspection had been made, the action was at least premature, since there was no allegation nor evidence that the condition could not be fulfilled.

Charles Edouard Chayer, Q.C., for the respondent. The steam shovel which the appellant purported to sell without the certificate could not by virtue of s. 12 be commercially dealt with. The vendor has the obligation of obtaining the certificate and in this case the appellant had to obtain it before the shovel could be again commercially dealt with. The violation by the appellant of s. 12 rendered the sale non-existent because it had no object, the object here being "hors du commerce", and null ab initio, because it was prohibited by a law of public order. The respondent was therefore justified in refusing as he did the tender. Any way this sale is considered, it was not operative and therefore the tender had no basis. The case of Jean v. Gagnon (supra), cited by the appellant, is distinguishable.

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The Chief Justice: L'appelante, défenderesse en Cour Supérieure, se pourvoit à l'encontre d'un arrêt de la Cour du Banc du Roi (en appel) ,3 rendu le 2 mai 1951, rejetant l'appel d'un jugement prononcé par la Cour Supérieure à Chicoutimi, et qui a maintenu l'intimé dans les conclusions d'une action en nullité d'une vente intervenue entre les parties le 16 février 1948. Les honorables juges Galipeault et Casey étaient toutefois dissidents et ont en conséquence conclu au maintien de l'appel et au rejet de l'action de l'intimé.

Il s'agit d'une convention constatée par un écrit sous seing privé, en date du 16 février 1948, par laquelle l'appelante vendait à l'intimé une pelle mécanique à vapeur. Le prix de vente est stipulé à $2,500, payable $1,000 comptant, et la balance représentée par trois billets promissoires de $500 chacun échéant respectivement les 17 février, 1949, 1950 et 1951.

L'intimé a fondé son action sur l'article 12 de la Loi des Appareils sous pression (c. 177, S.R.Q. 1941, modifiée par le Statut 6, Geo. VI, c. 51). Il se plaint de ce que la pelle à vapeur, qui est un appareil sous pression, au sens de la Loi, lui a été vendue et livrée avant que l'appelante ait obtenu le certificat "D" autorisant l'usage de la machine (art. 15, par. 4 ajouté par 6 Geo. VI, c. 51, art. 4).

Voici le texte de cet article 12 :

12. Tout appareil sous pression usagé, qu'il ait ou non, subi des réparations, ne peut être remis dans le commerce pour servir de nouveau, à moins que son propriétaire n'ait obtenu de l'inspecteur en chef un certificat autorisant l'usage dudit appareil.

Le contrat porte que la pelle est vendue sans garantie et que l'intimé en prendra livraison dans sa carrière de gravier, mais "en autant qu'elle fonctionnera." La machine fut en fait transportée dans une carrière de gravier appartenant à l'intimé et mise en état de fonctionnement.

Le 3 mars 1948, l'appelante écrivait elle-même à l'intimé et l'informait que la bouilloire de la pelle n'avait pas été inspectée pour l'année courante. Elle mentionnait, cependant, que la pelle avait déjà été inspectée et qu'un certificat avait été émis antérieurement; elle suggérait à l'intimé de faire inspecter lui-même la bouilloire de la pelle et elle lui réclamait le paiement de la somme de $1,000, soit la partie du prix payable comptant, que l'intimé n'avait pas encore acquitté.

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Sur réception de cette lettre, l'intimé faisait savoir à l'appelante qu'il exigeait qu'une inspection soit faite de la bouilloire. L'appelante lui répondit que l'inspection en question, pour le passé ou l'avenir, n'était pas une obligation que lui imposait le contrat de vente mais que cette obligation incombait à l'acheteur, puisque ce dernier avait convenu de se porter acquéreur de la pelle en libérant le vendeur de l'obligation de garantie.

La réponse à cette lettre fut l'action en nullité fondée sur la prétention que l'appareil sous pression usagé, au sens de la Loi, aurait été remis dans le commerce pour servir de nouveau, sans que le certificat prévu ait été émis.

Après la signification de l'action, soit le 12 avril 1948, l'appelante fit venir un inspecteur qui se rendit au lieu où se trouvait la pelle à vapeur. L'intimé refusa d'en laisser faire l'inspection. L'appelante fit alors signifier à l'intimé une mise en demeure et lui fit des offres réelles dans les termes suivants: elle offrait de faire inspecter la bouilloire, sans admettre toutefois qu'elle y fut tenue, et elle faisait également l'offre des frais de l'action avant la production de la défense, ajoutant que, si la bouilloire n'était pas dans les conditions voulues, elle consentirait à l'annulation de la vente; mais, si le certificat de l'inspection de la bouilloire était émis, l'intimé devait alors se conformer au contrat de vente et payer la somme de $2,500, selon les termes de la convention. L'appelante offrait les frais dans une alternative comme dans l'autre.

Les offres furent refusées et l'appelante les renouvela par sa défense, consignant en même temps la somme de $99.10 pour les frais judiciaires taxables de l'action avant contestation.

Après la production de la défense, l'appelante fit motion pour faire nommer un expert, sous l'autorité des articles 392 et suivants du Code de Procédure Civile. Elle demanda que l'expert nommé fut un inspecteur du Gouvernement provincial exerçant la fonction sous l'autorité de la Loi précitée.

La motion ayant été octroyée, l'inspection de la bouilloire fut confiée, du consentement des parties, à MM. P.-E. Bourque et Antonio Bouchard, tous deux inspecteurs des appareils sous pression à l'emploi de la province. Les conclusions des experts furent en tous points favorables à

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l'émission du certificat. Ils ajoutèrent que lorsqu'ils connaîtraient le nom du propriétaire réel, un certificat "D" serait émis pour une période d'un an, tel que requis par la Loi des Appareils sous pression.

Le seul motif des jugements de la Cour Supérieure et de la Cour du Banc du Roi (en appel) 4 est que l'appelante a fait défaut de faire inspecter la bouilloire et de fournir le certificat prévu lors de la vente, qu'il s'ensuit que cette vente est nulle de nullité absolue comme étant contraire à l'ordre public.

La consignation des offres réelles, la nomination des experts, la validité de leur rapport et le fonctionnement de la machine ne sont pas en question devant cette Cour.

Toute la preuve a révélé que la machine était dans des conditions normales de fonctionnement et que le rapport des experts établit sans conteste que la bouilloire, selon leur propre expression, "est en parfaite condition".

La question se pose donc en droit : La vente que constate l'écrit sous seing privé entre les parties est-elle inexistante, frappée de nullité absolue, par cette seule raison que l'appelante aurait enfreint l'article 12 de la Loi des Appareils sous pression ?

L'appelante a prétendu devant nous que le défaut d'avoir obtenu le certificat prescrit n'entraîne aucune nullité en l'espèce et que le défaut de faire émettre le certificat ne crée tout au plus qu'une condition suspensive qui n'affecterait que la livraison.

Je partage l'opinion exprimée par les juges dissidents en appel, le Juge en chef de la province de Québec et M. le Juge Casey.

J'appuie cette opinion, tout d'abord, sur la nature même du contrat de vente entre les parties. Il ne s'agit pas ici d'une convention par laquelle l'intimé est devenu propriétaire uniquement par suite de sa signature. Il fut convenu que l'appelante "devra mettre cette pelle en marche, savoir la transporter sur la propriété de M. Simard, soit dans son pit de sable, et la laisser en condition de fonctionnement". "La Compagnie appelante ne garantit aucunement cette pelle à vapeur; vu que cette machinerie est usagée, qu'il

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est au gré de M. Simard de la prendre comme elle sera, rendue dans le pit de sable, en autant qu'elle fonctionnera."

Et ce n'est "qu'en considération des motifs ci-inclus énoncés" que M. Simard s'engage à remettre la somme de $1,000, en monnaie, et la balance en trois billets promissoires de $500 chacun.

J'interprète ces stipulations comme voulant dire que la vente ne serait complétée que lorsque la pelle à vapeur aurait été transportée sur la propriété de M. Simard, à l'endroit mentionné, et que la pelle aurait été mise en condition de fonctionnement. Ce n'est, en effet, qu'en considération de ces motifs que M. Simard s'engage à payer. En fait, nous sommes informés par les offres réelles que l'intimé, même à la date où elles furent faites, n'avait pas encore effectué le paiement de la somme de $1,000 auquel il s'était engagé.

Je suis d'avis que ce premier motif doit être retenu à l'encontre de l'intimé.

En second lieu, le texte de l'article 12 de la Loi des Appareils sous pression, dont l'intimé demande l'application, édicté que tout appareil du genre de celui dont nous nous occupons "ne peut être remis dans le commerce pour servir de nouveau". Je ne puis me rendre à l'interprétation. que cet article s'applique autrement qu'à une vente commerciale. Or, il s'agit ici d'une vente civile. Ce n'est pas, en effet, pour en faire commerce que l'intimé a acquis la pelle à vapeur.

Ainsi que le fait très bien remarquer l'honorable Juge Fernand Choquette dans un jugement rendu en l'affaire La Compagnie de Sable Ltée v. Machinerie Moderne Ltée, qui malheureusement n'est pas rapportée, le mot "commerce" dans l'expression de l'article 12 n'a pas le sens du mot "commerce" dans l'expression "hors du commerce" de l'article 1486 C.C., non plus que dans le sens de "commerce" de l'article 1059 C.C. Il faut, au contraire, lui donner un sens qui se rapporte au droit commercial.

"L'objet du droit commercial est la spéculation sur les meubles de toute nature, matières premières et produits fabriqués, que les commerçants achètent dans l'espérance de les revendre plus chers qu'ils ne les ont payés; dans l'article 1128 C.N., ce mot a un sens différent, plus large

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et voisin du latin "commercium" ; il désigne la possibilité pour une chose de servir d'objet à un acte juridique (Planiol, Traité élémentaire de droit civil n° 1010."

Il n'apparaît pas à l'article 12 que le législateur ait voulu couvrir toutes les aliénations (il eut été trop facile de le dire). Par les termes dont il s'est servi, il a voulu limiter l'effet de la disposition à la "remise dans le commerce" ("commercially dealt with"). On ne saurait dire qu'un objet est "commercially dealt with" s'il s'agissait d'une aliénation à titre gratuit, et—il est presque inutile d'ajouter —d'une aliénation de nature non commerciale. Comment pourrait-on prétendre qu'une aliénation de ce genre remettrait l'objet dans le commerce? Ce serait une contradiction dans les termes.

Encore moins peut-on en venir à la conclusion que l'appelante aurait vendu une chose "hors du commerce". S'il s'agissait d'une vente commercialece que nous n'avons pas iciil faudrait alors dire qu'un objet qui n'est pas jusque-là hors du commerce serait placé dans cette catégorie par le fait même de la vente. Mais l'article 12 emploie les mots: "remis dans le commerce". Pour que l'appareil soit "remis dans le commerce", à raison de sa vente, il faudrait qu'il soit sorti du commerce avant la vente. Or, d'après la prétention de l'intimé, c'est la vente elle-même qui le met hors du commerce. Il ne peut être à la fois, par la vente elle-même, et en même temps "remis dans le commerce" avant qu'il en soit sorti.

J'en conclus donc par l'analyse même de l'article 12— peut-être que cet article, à cause de sa rédaction, peut difficilement être appliqué même à une vente commercialequ'à tout événement il ne peut recevoir d'application à une vente civile.

Ce qui, en plus, démontre que ce n'est pas l'acte contractuel de vente qui est visé par l'article 12 de la Loi des Appareils sous pression, ce sont les Règlements adoptés en vertu de cette Loi conformément à l'autorisation donnée au Lieutenant-Gouverneur en conseil à cet effet. Il n'y a qu'à lire les Règlements nos 64, 65 et 66 pour voir que c'est bien là la façon dont l'article 12 a été compris, même dans le cas d'une vente commerciale.

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Ces Règlements se lisent comme suit:

64. Personne ne doit remettre dans le commerce, pour servir de nouveau, un récipient usagé sans l'avoir fait inspecter par un inspecteur.

65. La personne qui dispose d'un récipient doit donner, par écrit, à l'inspecteur en chef, le nom et l'adresse de la personne à qui le récipient sera livré.

66. Après une inspection satisfaisante, l'inspecteur émet un certificat "D" à la personne à qui le récipient sera livré pour être utilisé. Nul ne doit livrer ce récipient avant l'émission du certificat "D".

On voit donc, tout d'abord, qu'il faut faire inspecter l'appareil usagé avant de le "remettre dans le commerce, pour servir de nouveau" et que, dans le but de faire effectuer cette inspection, la personne qui dispose de l'appareil doit donner, par écrit, à l'inspecteur en chef le nom et l'adresse de la personne à qui le récipient sera livré. Pour qu'une personne qui dispose de l'appareil puisse ainsi donner à l'inspecteur en chef le nom et l'adresse de la personne à qui se fera la livraison, il me paraît nécessaire que l'acte contractuel soit déjà passé. Je ne vois pas comment le vendeur pourrait accomplir cette formalité avant la vente. Mais, surtout, l'on remarquera que le Règlement n° 65 ne parle pas de vente mais de livraison.

D'ailleurs, le Règlement n° 66 est encore plus catégorique. L'inspecteur, après une inspection satisfaisante, émet le certificat "D", non pas au vendeur mais à l'acheteur ("à la personne à qui le récipient sera livré, pour être utilisé") ; et ce règlement ne dit pas que la vente ne doit pas être effectuée avant l'émission du certificat "D", mais simplement: "Nul ne doit livrer ce récipient avant l'émission du certificat "D"."

C'est donc avec raison, suivant moi, que l'honorable Juge Choquette, dans la cause déjà citée, fait remarquer que, d'après ces textes, les formalités prescrites sont subséquentes à la disposition de l'appareil; qu'elles ne doivent précéder que la livraison et que, par conséquent, elles ont tout au plus l'effet d'une condition suspensive, avec le résultat que, la condition étant accomplie, elle a un effet rétroactif au jour auquel l'obligation a été contractée (C.C. 1085).

A plus forte raison cela doit-il être dans un contrat comme celui qui nous occupe, où la vente n'a pas été parfaite par le seul consentement des parties et n'a pas eu pour effet de transmettre la pelle à vapeur immédiatement, puisque le vendeur s'était obligé à la transporter sur

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la propriété de l'intimé, à la mettre en marche, à "la laisser en condition de fonctionnement", et que l'intimé n'en de- venait propriétaire que lorsqu'elle serait "rendue dans le pit de sable et en autant qu'elle fonctionnera".

J'en arrive donc à la conclusion qu'il est erroné d'interpréter l'article 12 comme s'adressant à une vente de la nature de celle que nous avons dans le cas actuel, parce que c'est une vente non commerciale. Mais en plus qu'en appliquant cet article à la lumière des Règlements nos 64, 65 et 66, même s'il s'agissait d'une vente commerciale, ce n'est pas la vente qui est visée par l'article 12, c'est la livraison. Ce ne serait donc pas l'acte contractuel qui serait vicié par l'absence d'un certificat d'inspection antérieur à cet acte et la vente ne serait pas défendue. La livraison seule le serait. Tout au plus y aurait-il donc condition suspensive qui ferait tomber la cause actuelle sous l'arrêt de cette Cour dans l'affaire de Jean v. Gagnon 5. Dans ce cas, les offres réelles de l'appelante auraient été faites en temps utile et l'intimé aurait dû les accepter. Mais je dirais plutôt, en l'espèce actuelle, qu'entre les parties, la vente n'étant pas affectée par l'article 12, la livraison effectuée par l'appelante satisfaisait à toutes les obligations du vendeur vis-à-vis de l'acheteur. Seule la livraison aurait eu lieu avant l'obtention du certificat et pourrait, même en matière commerciale, constituer une infraction technique à la loi, qui n'aurait pas pour effet d'annuler cette livraison, mais tout au plus de rendre le vendeur passible des pénalités imposées par la Loi des Appareils sous pression.

J'infirmerais le jugement de la Cour Supérieure et celui de la majorité de la Cour du Banc du Roi (en appel), et, adoptant les raisons ci-dessus mentionnées, ainsi que celles de l'honorable Juge en chef de la province de Québec et de M. le Juge Casey, je maintiendrais les offres réelles de l'appelante et je rejetterais l'action de l'intimé, avec les dépens de la Cour Supérieure à partir du moment où les offres furent faites, ainsi que ceux de la Cour du Banc du Roi (en appel) et de la Cour Suprême du Canada.

The judgment of Taschereau, Estey and Fauteux JJ. was delivered by

Taschereau, J.—Le Très Honorable Juge en chef a exposé les faits d'une façon complète, et il est en conséquence inutile de les relater de nouveau. Je désire cepen-

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dant ajouter quelques notes pour préciser les raisons pour lesquelles je crois que le présent appel doit être maintenu.

La Loi concernant Les Chaudières à Vapeur et les Appareils sous Pression (S.R.Q. 1941, c. 177 telle qu'amendée par 6 Geo. VI, chap. 51), prévoit que quatre formes de certificats peuvent être émis, désignés comme suit:

Le certificat "A"' émis pour l'approbation de la construction des appareils sous pression après vérification de tous les plans et devis et inspection finale desdits appareils à l'endroit de la fabrication;

Le certificat "B" émis pour l'approbation de l'installation des appareils sous pression, avant qu'ils soitnt utilisés dans leur lieu d'opération ;

Le certificat "C" émis lors de l'inspection annuelle des appareils sous pression;

Le certificat "D" émis pour tout appareil usagé avant sa remise dans le commerce.

C'est ce quatrième paragraphe qui nous intéresse, car il s'agit dans l'occurrence d'un appareil usagé, et dans ce cas, l'article 12 de la Loi trouve son application. Il se lit ainsi:

12. Tout appareil sous pression usagé, qu'il ait ou non subi des réparations, ne peut être remis dans le commerce pour servir de nouveau, à moins que son propriétaire n'ait obtenu de l'inspecteur en chef, un certificat autorisant l'usage dudit appareil.

Lorsque la Compagnie appelante a vendu à l'intimé, pour la somme de $2,500, cette pelle à vapeur usagée, qui est l'objet de ce litige, elle avait donc la double obligation de livrer l'objet vendu, et d'obtenir de l'inspecteur en chef le certificat "D" autorisant sa "remise dans le commerce". Il ne fait pas de doute que le mot "propriétaire" que l'on trouve à l'article 12 de la Loi signifie bien le "vendeur".

Cependant, l'appelante n'a pas rempli cette obligation qui lui incombait et qui lui était imposée par la loi, mais sur réception de l'action en annulation de vente que l'intimé a dirigée contre elle, le 24 mars 1948, elle a offert de faire inspecter la pelle à vapeur afin d'obtenir le certificat requis, et de payer les frais de l'action. Vu le refus du défendeur d'accepter ces offres, l'appelante a produit son plaidoyer dans lequel les offres ont été renouvelées avec consignation. Lorsque la défense fut produite, l'appelante fit motion pour obtenir une expertise, et MM. P.-E. Bourque et Antonio Bouchard, inspecteurs du Gouvernement provincial, furent nommés de consentement. Le rapport fut à l'effet qu'ils étaient d'opinion que le certificat "D" pouvait être émis vu que la pelle mécanique rencontrait toutes les exigences de sécurité voulues.

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La cause se résume donc à une question de droit, et j'en suis venu à la conclusion suivante: Il s'agit, je crois, d'une vente à laquelle une charge ou une obligation accessoire a été ajoutée par la loi, et imposée au propriétarie. C'est lui qui doit voir à ce qu'un certificat soit émis, à défaut de quoi, la pelle mécanique ne peut être livrée si elle "doit servir de nouveau". Si l'appelante n'avait pu obtenir ce certificat, condition essentielle à la remise de l'objet usagé dans le commerce, la vente eut été annulable, mais en l'obtenant, elle l'a complétée, et s'est libérée de l'obligation imposée par l'article 12 de la Loi.

Il me semble difficile de concevoir une autre solution pour déterminer le présent litige. Il faut de toute nécessité que le vendeur d'un appareil sous pression usagé trouve en premier lieu un acheteur à qui il doit remettre le certificat "D", auquel est subordonnée la livraison de l'objet vendu.

Sur réception de l'action, l'appelante a offert la pelle mécanique, s'est déclarée prête à fournir le certificat, et a consigné les frais encourus. L'offre du certificat est venue après l'action, mais ceci ne peut affecter le sort de la cause. Tant que le jugement n'était pas prononcé annulant le contrat pour défaut par l'appelante de remplir son obligation, celle-ci pouvait compléter son titre. (Jean v. Gagnon 6). Dans cette cause, cette Cour a confirmé la jurisprudence et l'opinion unanime des auteurs. Ainsi, dans Gagnon v. La Coopérative Fédérée de Québec 7, M. le Juge Dorion, parlant pour la Cour d'Appel, a dit ce qui suit :

L'intimée prétend de son côté qu'elle n'est pas dans le cas de l'article 1092 et que, admettant qu'il y a lieu à l'annulation du contrat par suite de son défaut d'en exécuter les obligations en négligeant de donner les garanties promises, cette annulation en vertu du pacte commissoire tacite, n'a pas lieu de plein droit, que par conséquent, elle peut, en exécutant son obligation avant que jugement intervienne, empêcher cette annulation et se prévaloir de son droit de payer par anticipation et de déduire l'intérêt.

Cette distinction est parfaitement juridique et elle est admise par la doctrine française citée par l'intimée.

Planiol (Vol. 2, 8e éd., page 437) s'exprime dans les termes suivants:

La résolution, étant l'œuvre du juge, et non de la volonté des parties, ne se produit qu'au moment du jugement le défendeur peut jusqu'au jugement empêcher la résolution par une offre d'exécuter son engagement.

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C'est aussi l'opinion de Baudry-Lacantinerie (Des Obligations, Vol. 2, page 189) où l'on trouve:

Au contraire, lorsque les sûretés promises n'ont pas été fournies, ce fait peut être réparé aussi longtemps qu'un jugement n'est pas venu déclarer la dette exigible, et, par suite, tant que cette décision n'a pas été rendue, le débiteur peut, en exécutant sa promesse, éviter la déchéance, etc., etc.

Je suis donc d'opinion que le présent appel doit être maintenu et l'action rejetée. Sur réception du certificat "D" auquel il a droit, et qui lui a été offert, l'intimé devra prendre livraison de la pelle mécanique et en payer le prix suivant les termes du contrat intervenu. L'intimé devra également payer les frais de toutes les cours, sauf ceux encourus jusqu'après plaidoyer en Cour Supérieure.

Rand J. (dissenting) : The primary effect of the statute seems to me to be beyond doubt; to require as a condition of being an article of commerce that every new pressure vessel be built according to plans registered in the Department and under inspection authorized either by the provincial law or the law of the place of construction outside the province. The provisions contemplate construction, installation and operation; and they are designed to secure the safe condition of every vessel at the moment of sale.

Then section 12 deals with second hand or used vessels and declares,

Tout appareil sous pression usagé, qu'il ait ou non subi des réparations, ne peut être remis dans le commerce pour servir de nouveau, à moins que son propriétaire n'ait obtenu de l'inspecteur en chef, un certificat autorisant l'usage dudit appareil.

"Être remis dans le commerce pour servir de nouveau" means, in my opinion, to be made an authorized subject-matter of legal dealing; and it applies to every stage of sale from the contract to the delivery. To treat these two latter features, for the purpose of construing the statute, as severable, is to introduce a conception which the statutory language does not justify. What is aimed at is to furnish the same security in second hand sales as in the case of new machines; and until the certificate is given the vessel cannot, in any respect, be dealt with commercially.

I would dismiss the appeal with costs.

Appeal allowed with costs.

Solicitor for the Appellant: R. Fradette.

Solicitor for the Respondent: C. E. Chayer.



1 Q.R.[1951]KB.546.

2 [1944]S.C.R.175.

3 Q.R. [1951] K.B. 546.

4 Q.R. [1951] K.B. 546.

5 [1944] S.C.R. 175.

6 [1944] S.C.R. 175 at 188.

7 Q.R. [1926] K.B. 59.

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