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Supreme Court of Canada

Appeal—Jurisdiction—Judgment by appellate court quashing appeal—Pledge in money given in place of regular security—Not furnished in conformity with article 1215a C.C.P.—No amount or value in controversy—Supreme Court Act, section 39.

Proceedings in appeal brought by the appellant were quashed by the appellate court on the ground that the security given by him was irregular and illegal, because he had furnished, in lieu of the regular security required by article 1214 C.C.P., a pledge consisting of a sum of money which was not in conformity with the provisions of article 1215a of that code. The appellant appealed to this Court.

Held that there is no jurisdiction in this Court to entertain the appeal.—There is no amount or value in controversy in the appeal in accordance with the requirement of section 39 of the Supreme Court Act.

[Page 521]

MOTION to quash for want of jurisdiction an appeal from a decision of the Court of King's Bench, appeal side, province of Quebec, quashing an appeal to that Court for failure by the appellant to give security in conformity with the provisions of the Civil Code of Procedure.

Antoine Rivard K.C. for the motion.

Valmore Bienvenue K.C. contra.

The Court:—

L'appelant a inscrit cette cause en appel devant la Cour Suprême du Canada d'un jugement rendu par la Cour du Banc du Roi, division d'appel de la province de Québec, rejetant son appel devant cette dernière Cour sur le motif que le cautionnement fourni par l'appelant, à l'appui de son inscription en Cour du Banc du Roi, était irrégulier et illégal, en ce qu'il avait sans droit substitué au cautionnement qu'exige la loi un dépôt à faire en argent.

La Cour du Banc du Roi a décidé que ce n'est que par exception qu'il peut être dérogé aux dispositions de l'article 1214 du code de procédure civile, en suivant les exigences de l'article 1215a de ce code, à savoir:

que le montant du gage en argent doit être fixé par un juge de la Cour du Banc du Roi ou de la Cour Supérieure,

ce qui n'a pas été fait dans le cas actuel.

En l'espèce, la Cour du Banc du Roi s'est basée sur sa propre décision re: Furois v. Cossette[1].

Dans cette affaire de Furois1, la Cour du Banc du Roi avait déclaré que le dépôt d'un montant en argent pour tenir lieu de cautionnement en appel, lorsque le montant n'a pas été au préalable fixé par un juge de la Cour du Banc du Roi ou un juge de la Cour Supérieure, doit être tenu pour nul et inexistant, sauf les cas où l'irrégularité aurait été commise de bonne foi et que, tel que fourni, ce gage serait par ailleurs substantiellement suffisant.

Nous n'avons pas à nous prononcer sur la valeur de cette décision de la Cour du Banc du Roi; nous n'avons qu'à décider si la Cour Suprême du Canada a juridiction, sans permission spéciale, pour connaître d'un appel au mérite en pareil cas.

[Page 522]

L'appelant a fait valoir que lorsqu'il s'est présenté devant le Protonotaire de la Cour Supérieure à Montmagny, dans le but de fournir cautionnement à l'appui de son appel à la Cour du Banc du Roi, il avait donné avis que, au lieu du cautionnement mentionné dans l'article 1214 du code de procédure, il donnerait, en nantissement, un gage suffisant en une somme d'argent au montant de $3,600.00.

Devant le Protonotaire, le procureur de l'intimé ne s'était objecté qu'au montant pour lequel avis avait été donné, sans s'opposer à ce que le cautionnement prenne la forme d'un gage en argent.

Il a alors prétendu que le montant devrait être de $3,900.00, sur quoi le Protonotaire décida qu'il serait suffisant de déposer $3,700.00.

C'est à la suite de cette décision du Protonotaire que l'intimé fit motion pour faire déclarer le cautionnement illégal, irrégulier et insuffisant, et pour demander que l'appel soit en conséquence rejeté avec dépens.

Cette motion de l'intimé fut accordée en entier par la Cour du Banc du Roi, et c'est ce jugement que l'appelant prétend maintenant porter en appel devant cette Cour.

L'appelant a invoqué l'article 33 du code de procédure qui, lorsqu'il n'y a pas de juge compétent à connaître d'une matière au chef-lieu d'un district, permet au Protonotaire d'en remplir les fonctions dans le cas de nécessité évidente, ou lorsque, à raison du délai, un droit pourrait autrement se perdre ou être en danger.

En pareil cas, l'ordonnance ou le jugement rendu par le Protonotaire peut être révisé par le tribunal, à la séance suivante, ou par un juge de la Cour Supérieure présent ensuite dans le district, pourvu que la partie qui se prétend lésée produise, sous trois jours, au greffe, une exception énonçant les motifs pour lesquels la révision est demandée.

La décision du tribunal ou du juge, annulant l'ordonnance ou le jugement du Protonotaire, remet alors les choses dans le même état qu'elles auraient été si l'ordonnance ou jugement n'avait pas été rendu.

[Page 523]

Cet argument a été soumis par l'appelant à la Cour du Banc du Roi lors de l'audition de la motion de l'intimé, pour rejet de l'appel devant cette Cour, par suite de l'irrégularité du cautionnement qui était alors invoquée; mais le jugement sur la motion n'en parle pas, et nous devons en conclure que la Cour du Banc du Roi a été d'avis que cet argument ne pouvait sauver la procédure adoptée par l'appelant.

A tout événement, cette question ne pouvait être discutée devant nous que si nous avions juridiction pour entendre l'appel au mérite.

L'objection fatale, à l'égard de l'exercice de notre juridiction en cette matière, est qu'il n'y a, dans cet appel, aucun montant ou valeur en contestation.

Les restrictions de cette Cour sont clairement définies par l'article 39 de la Loi de la Cour Suprême. Il faut que la somme ou la valeur de l'affaire en litige dans l'appel dépasse $2,000.00, ou il faut qu'une permission spéciale d'appel ait été obtenue de la plus haute Cour de dernier ressort ayant juridiction dans la province où les procédures ont été instituées originairement.

L'article 41 permet, en outre, à la Cour Suprême d'accorder cette permission dans certains cas spéciaux énumérés dans cet article.

L'appel actuel ne présente aucun de ces cas spéciaux; et d'ailleurs, permission spéciale d'appel n'y a été accordée, ni par la plus haute cour de dernier ressort de la province, ni par notre Cour.

La seule cause de juridiction qui subsiste, c'est donc que la somme ou la valeur de l'affaire en litige dans l'appel dépasse $2,000.00.

Or il est évident que cette dernière condition n'existe pas.

Tout ce qui est en litige ici et tout ce que nous pourrions accorder par le jugement que nous serions appelés à rendre, c'est que la Cour du Banc du Roi en Appel a eu tort de décider que le cautionnement, en l'espèce, était irrégulier, illégal et nul; que, conséquemment, l'appel n'aurait pas dû être rejeté sur ce motif; et que le dossier doit donc être retourné à la Cour du Banc du Roi, pour qu'il y soit précédé à l'audition sur le mérite de la cause.

[Page 524]

Un cas à peu près semblable s'est présenté devant cette Cour, dans la cause de Tremblay v. Duke-Price Power Co.[2]. Là, aucun cautionnement n'avait été fourni dans les délais prescrits (article 1213 C.P.C.) et l'intimé avait obtenu, du Protonotaire de la Cour Supérieure, un certificat du défaut de l'appelant de fournir tel cautionnement.

Il s'ensuivit que, en vertu de l'article 1213 du code de procédure, l'inscription en appel était censée désertée, sauf recours; et, par le jugement qui nous était soumis, l'inscription en appel avait été déclarée désertée, et une requête de l'intimé pour rejet d'appel avait été accordée avec dépens.

Cette Cour fit alors remarquer que la question de savoir si le montant ou la valeur de l'affaire en litige dans l'appel dépasse $2,000.00 dépendait non pas de la demande contenue dans l'action, mais de ce qui pouvait faire l'objet de la contestation dans l'appel projeté, (Dreifus v. Royds[3]; Jack v. Cranston[4]). Elle ajouta que, dans cet appel de Tremblay[5], la seule affaire en litige était la question de savoir si la Cour du Banc du Roi avait correctement jugé que les procédures de l'appelant devaient être tenues pour avoir été désertées, à raison des articles du code de procédure civile.

Il fut alors décidé que cette question était vraiment réglée par l'arrêt re Gatineau Power Company v. Freeman Cross[6].

Dans la cause de Gatineau Power Company6 la question en litige consistait dans le droit d'appel à la Cour du Banc du Roi, et il fut jugé que "such right was not appreciable in money". La Cour ajouta que re Tremblay v. Duke-Price Power Co.5 le seul point à décider était la régularité des procédures adoptées par l'appelant devant la Cour du Banc du Roi; son droit d'appel n'était pas mis en question; et que s'il était encore dans les délais requis, il n'était pas nécessaire de produire une nouvelle inscription, vu que ce recours lui était spécialement réservé par l'article 1213 du code de procédure civile.

[Page 525]

Donc, Tremblay, s'il était maintenant privé des moyens pour poursuivre son appel efficacement, ne devait pas attribuer cette situation au résultat direct du jugement dont il voulait appeler, mais seulement à une conséquence indirecte et collatérale dans les circonstances particulières où il se trouvait. Bulger v. The Home Insurance Company[7].

Le jugement qui a été rendu dans la présente cause est bien un jugement final, puisque l'appel a été rejeté. Dans ce sens, il pourrait être assimilé à la cause de Ripstein v. Trower & Sons Limited[8], l’action avait été rejetée sur une exception déclinatoire. Dans cette cause, le demandeur avait inscrit en appel devant cette Cour, sans obtenir de permission spéciale d'appel.

Nous avons rejeté une motion pour casser l'appel pour défaut de juridiction, en invoquant le motif que l'action elle-même avait été renvoyée et que, par conséquent, c'était le droit même du demandeur d'instituer et de poursuivre son action qui était en litige. (Voir ce que dit Lord Watson, Déchène v. City of Montreal[9].

Le jugement sur la motion pour rejet d'appel pour cause de défaut de juridiction dans l'affaire de Ripstein, n'est pas rapporté. Seul le jugement au mérite se trouve au volume des rapports de cette Cour de 1942, à la page 107. Comme dans la présente cause, il s'agissait d'un jugement final. Mais, contrairement à l'affaire Ripstein, ici il n'y a pas de montant en jeu. Il y a bien le jugement que cette Cour a rendu dans l'affaire de British American Brewing Company Ltd., v. His Majesty the King[10], où juridiction a été admise à la suite d'un jugement rendu par la Cour d'Echiquier du Canada, et rejetant une action alors que l'avocat du pétitionnaire avait d'abord demandé la remise de la cause par suite de l'absence de ses témoins, que la Cour avait refusé cette remise et que, l'avocat du pétitionnaire ayant alors déclaré qu'il n'était pas en état d'offrir de preuves, la Cour d'Echiquier du Canada avait alors rendu le jugement en question.

A première vue, cet arrêt de notre Cour pourrait paraître présenter avec l'appel actuel certains points de similarité; mais, à y regarder de plus près, l'on s'aperçoit que

[Page 526]

le motif du jugement de cette Cour dans l'affaire British American Brewing Company Ltd. (1) est véritablement que, après tout, il s'agissait d'un cas où le fardeau de la preuve incombait au pétitionnaire et où la Cour d'Echiquier du Canada, siégeant au procès, avait rejeté la pétition pour le motif qu'il n'y avait devant elle aucune preuve justifiant son maintien.

En plus, dans cette affaire de British American Brewing Company Ltd. (1), l'appel était d'un jugement de la Cour d'Echiquier du Canada, et le droit d'appel dépendait de l'interprétation de l'article 82 de la Loi qui régit cette Cour.

Nous ne croyons pas qu'il faille assimiler un appel venant de la Cour d'Echiquier du Canada à un appel venant de la Cour du Banc du Roi de la province de Québec, et où nous sommes appelés à appliquer le code de procédure civile de cette province.

Sur les questions qui se soulèvent par suite de la motion de l'intimé, en l'espèce actuelle, il ne paraît pas possible de faire de distinction entre la présente situation et celle qui s'offrait dans la cause de Tremblay v. Duke-Price Power Co. (2) et nous devons suivre la direction qui a été donnée dans cette dernière affaire.

La motion de l'intimé pour casser l'appel doit donc être maintenue avec dépens.



[1] Q.R. [1943] R.B. 239.

1 Q.R. [1943] R.B. 239.

[2] [1933] S.C.R. 44.

[3] (1922) 64 Can. S.C.R. 346.

[4] [1929] S.C.R. 503.

[5] [1933] S.C.R. 44.

[6] [1929] S.C.R. 35.

6 [1929] S.C.R. 35.

5 [1933] S.C.R. 44.

[7] [1927] S.C.R. 451, at 453.

[8] [1942] S.C.R. 107.

[9] [1894] A.C. 640, at 645.

[10] [1935] S.C.R. 568.

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