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Supreme Court of Canada

Municipal corporation—By-law authorizing works—Action by ratepayer—Annulment—Contractors mis-en-cause in trial court—Not joined in the proceedings before appellate court—Judgment in appeal annulling contract—Nullity—Res judicata.

The respondent, a ratepayer, brought an action against the appellant municipal corporation for the annulment of a by-law and contracts authorizing the construction of three bridges; and he joined in the case the contractors to whom were awarded the contracts. The trial judge having dismissed the action, the respondent appealed from that judgment but only against the municipal corporation. The appellate court declared the by-law valid, but annulled the contracts.

Held that an appellate court, the same as the trial judge, cannot pronounce the nullity of a contract when all the contracting parties have not been called before the court; that in this case the contractors were not made parties in the proceedings before the appellate court; that it is now impossible to order that they should be joined in proceedings before this court or the appellate court as the decision of the trial judge has acquired the authority of res judicata as to them. Therefore, the appellate court could not validly render a judgment annulling the contracts, and the judgment appealed from must be reversed.

APPEAL from the decision of the Court of King’s Bench, appeal side, province of Quebec, reversing the judgment of the trial judge, Lemieux C.J., and maintaining the respondent’s action.

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The material facts of the case and the question at issue are stated in the above head note and in the judgment now reported.

Ls. St. Laurent K.C. and Oscar Boulanger K.C. for the appellant.

Noël Belleau K.C. and Lucien Moraud K.C. for the respondent.

The judgment of the court was delivered by

Rinfret, J.L’appelante est une corporation municipale régie par le code municipal de la province de Québec.

L’intimé est un électeur de cette municipalité et l’un des contribuables appelés à payer le coût des travaux dont il s’agit dans cette cause.

Le 4 mars 1929, l’appelante a adopté un règlement ordonnant la construction de trois ponts. L’exécution des travaux fut confiée, au moyen de trois contrats, à une société d’entrepreneurs.

Par voie d’action ordinaire devant la Cour Supérieure, l’intimé a demandé l’annulation du règlement et des contrats, en invoquant plusieurs moyens, dont le principal était que l’appelante, avant d’octroyer les contrats, ne s’était pas conformée aux exigences de l’article 627 (a) due code municipal.

Cette action fut dirigée contre la corporation municipale, comme défenderesse, et contre les entrepreneurs, comme mis en cause.

La Cour Supérieure, ayant écarté comme mal fondés tous les moyens soulevés par l’intimé, trouva le règlement

en tout conforme à l’article (a) du code municipal,

l’interprétation comme pourvoyant efficacement

au prélèvement d’une taxe spéciale des contribuables pour le paiement du quart du coût de la construction des ponts,

(la balance étant payée au moyen d’une subvention du gouvernement) et déclara les contrats valides.

Le juge de première instance ajoute d’ailleurs que la presque totalité de la part incombant à l’appelante, dans le prix des contrats, avait été acquittée à l’égard des entrepreneurs au moyen de matériaux vendus à ces derniers. Comme conséquence, les contribuables n’avaient été appelés à payer qu’une somme très minime.

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Celle du demandeur s’est élevée à $0.80, et il paraît avoir été le seul à ne pas avoir acquitté cette faible contribution.

En plus, lors de l’audition devant la Cour Supérieure, les travaux étaient terminés, acceptés et reçus par le département des travaux publics et par l’appelante, sans aucune protestation de la part des contribuables, et tout le monde paraît avoir été satisfait”. Les entrepreneurs avaient été payés et les ponts étaient ouverts à la circulation.

Ces faits furent prouvés à l’enquête, par suite d’un plaidoyer puis darrein continuans dûment autorisé. Ils sont constatés au jugement de la Cour Supérieure, qui conclut, après avoir fait remarquer que, en vertu de l’article 627 (a) C.M., l’intimé aurait pu demander l’émanation d’un bref d’injonction pour empêcher l’exécution des travaux:

Il n’en a rien fait; et, par son silence, il a tacitement approuvé tout ce que le conseil a fait. La procédure adoptée par lui dans la présente cause est le résultat d’une arrière-pensée. D’ailleurs, à l’audition, il a admis que le tout se réduisait à une question de frais.

La cour rejeta l’action avec dépens.

Par ce jugement, il fut donc déclaré, tant à l’égard de la corporation municipale qu’à l’égard des entrepreneurs, que le règlement ordonnant la construction des trois ponts était légal, et que les contrats pour l’exécution des travaux étaient valides et liaient la corporation vis-à-vis des entrepreneurs.

L’intimé inscrivit sa cause en appel seulement à rencontre de la corporation municipale.

La Cour du B anc du Roi décréta de nouveau que le règlement était légal; mais la majorité décida que les contrats n’étaient pas valides, parce que le règlement ne pourvoyait pas à l’appropriation des deniers nécessaires pour payer le coût des travaux.

Le règlement, sur ce point, se lit comme suit:

Pour le pont Patoine:

Il est aussi statué et ordonné qu’une taxe spéciale sera prélevée sur tous les biens imposables des contribuables obligés audit pont afin d’en faire le paiement dans un seul versement au comptant.

Pour les ponts LaBrecque et Letellier:

Il est aussi statué et ordonné qu’une taxe spéciale sera imposée et prélevée sur tous les biens, etc.

La majorité de la cour exprima l’opinion que, par cette phraséologie (employant le temps futur au lieu du temps présent), le règlement n’impose actuellement aucune taxe spéciale ou autre”. Elle jugea donc que les contrats pour

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l’exécution des travaux avaient été octroyés avant que la corporation eût satisfait à toutes les prescriptions de l’article 627 (a) C.M., et que la demande en nullité devait être accueillie quant aux trois contrats attaqués.

M. le juge Bond, toutefois, trouvait que la discussion n’avait plus qu’un intérêt académique, vu que les travaux étaient terminés, que le gouvernement provincial avait versé sa part de l’entreprise et que les entrepreneurs avaient été payés. Il considérait que l’omission reprochée par la majorité était

ex post jacto immaterial * * * and no useful purpose will be served now by annulling these contracts, which have been completely executed and paid for.

Il n’eût donc maintenu l’action de l’intimé que pour les frais; et il n’eût pas annulé les contrats.

Il appert d’ailleurs des notes de jugement déposées au nom des autres juges qu’ils fussent arrivés à la même conclusion que M. le juge Bond, s’ils n’eusent été d’avis que la preuve des faits postérieurs à l’action était irrégulière et qu’il n’était pas possible de la prendre en considération.

Il nous semble cependant que la présence au dossier d’un plaidoyer puis darrein continuons justifiait la preuve qui a été faite, et, en tenant compte de toutes les circonstances, devant l’admission de l’intimé enregistrée au jugement de la Cour Supérieure que le tout se réduisait à une question de frais”, nous croyons que le plus que l’intimé aurait dû obtenir en l’espèce, eût dû être le maintien de son action pour les frais seulement. Mais, pour le motif qu’il nous reste à exposer, et sans nous prononcer sur les autres questions soulevées, nous croyons que la Cour du Banc du Roi ne pouvait pas annuler les contrats, comme elle l’a fait.

Ces contrats ont été déclarés valides par la Cour Supérieure dans une instance entre l’intimé d’une part, et la corporation appelante ainsi que les entrepreneurs d’autre part. L’intimé, nous l’avons vu, a inscrit en appel seulement contre la corporation. Les entrepreneurs, parties aux contrats, n’étaient pas devant la Cour du Banc du Roi. Or, la nullité d’un contrat ne peut être prononcée que dans une instance où tous les contractants sont devant le tribunal comme parties. C’est l’arrêt de la Cour du Banc du Roi de la province de Québec dans la cause de Lachapelle

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v. Niger (1)[1] et c’est le principe posé par la Cour Suprême dans la cause de Burland v. Moffatt[2]:

The nullity of a deed should not be pronounced without putting all the parties to it en cause en déclaration de jugement commun.

En général, on remédie à une semblable situation en ordonnant la mise en cause des personnes dont la présence est nécessaire. C’est ce que nous avons fait tout récemment encore (19 mars 1928) dans la cause de Lamarre v. Prudhomme. Ce qui est arrivé dans cette affaireet cela est susceptible de se produire dans chaque espèce du même genreest que les parties dont la mise en cause fut ainsi ordonnée ont représenté qu’elles avaient droit de lier contestation par des défenses écrites et, à tout événement, de recommencer l’instruction pour leur propre compte afin de contre-interroger les témoins de la partie adverse et de soumettre la preuve quelles pouvaient avoir à offrir. Cette cour a dû faire droit à ces représentations et a remis la cause devant le tribunal de première instance.

Dans tous les cas, avant de prononcer la nullité d’un contrat, toutes les parties contractantes doivent être appelées devant le tribunal. Et ce principe s’impose tout autant à la juridiction d’appel que devant le tribunal de première instance.

Or, dans l’espèce, les entrepreneurs n’étaient pas devant la Cour du Banc du Roi, et il n’est plus possible de les mettre en cause parce que, en ce qui les concerne, nonobstant l’appel contre la corporation municipale, la première décision conserve toute sa force et a acquis pour eux l’autorité de la chose jugée. (Sirey, 1907, I. 13.) Ils ne peuvent plus être appelés à venir défendre des contrats qui, à leur profit, ont été définitivement jugés valides.

Le résultat est que, dans la même cause et à l’instance du même demandeur, des contrats entre la corporation de St-Gervais et ses entrepreneurs ont été déclarés valides quant aux entrepreneurs et invalides quant à la corporation. Cette dernière est liée envers ses entrepreneurs par un jugement passé en force de chose jugée et elle serait déclarée déliée par un jugement en appel où les entrepreneurs ne figuraient plus. Résultat inadmissible et qui rendrait chacun des jugements impossible d’exécution.

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La Cour de Cassation décide que l’appel dirigé contre quelques-unes seulement des parties qui ont figuré en première instance est irrecevable, lorsque la contestation ne peut être jugée que contradictoirement avec les parties omises (D. 1854. 3. 29; D. 72. 1. 442; D. 1906. 1. 310; S. 1909. 1. 370; D. 1922. 1. 163. D. 1924. 1. 189; 1927. 1. 248).

Un exemple tiré de Dalloz (Répertoire, vbo. Appel civil, 611) nous paraît très au point. Il dit:

Quant aux parties intéressées à l’appel, ce n’est pas seulement une faculté, c’est une obligation pour l’appelant de les intimer. Ainsi, lorsqu’on a actionné en première instance le vendeur et l’acquéreur, pour faire déclarer une vente nulle, on ne peut, sur l’appel, se contenter d’assigner le vendeur; il faut citer les deux parties.

A l’appui de cette proposition, il cite le jugement dans la cause de Hervé c. Larue, où le passage qui a trait à cette question se lit comme suit:

Attendu que Hervé n’a pas relevé appel du jugement du 19 août 1811 contre Fromont, acquéreur, mais seulement contre Larue, vendeur; et qu’il n’est pas possible d’annuler le contrat de vente qui fait l’objet du procès, dans l’intérêt du vendeur, tandis qu’il subsisterait dans celui de l’acquéreur; d’où il résulte que la prétention de Hervé est non recevable devant la cour, attendu qu’elle ne lui est soumise que par un appel relevé contre Larue seul, et adoptant au surplus les motifs du jugement dont est appel.

Cette solution nous paraît inévitable dans la cause actuelle. L’inscription en appel de l’intimé était insuffisante et inefficace pour faire prononcer la nullité des contrats. S’il y avait eu moyen d’y remédier, nous l’aurions fait. Comme cela n’est pas possible, il faut adopter la seule alternative qui reste ouverte.

L’intimé ne peut s’en plaindre, parce que c’était à lui qu’il incombait de mettre devant la Cour du Banc du Roi toutes les parties requises. Comme le disait M. le juge Taschereau, dans la cause de Burland v. Moffatt[3]:

He has failed voluntarily to put the court in a position to grant (his demand), and his adversary has then an acquired right to its dismissal.

Notre devoir est de rendre le jugement que la Cour du Banc du Roi aurait dû rendre (Loi de la Cour Suprême, art. 47). La Cour du Banc du Roi ne pouvait pas annuler les contrats alors qu’elle n’avait pas toutes les parties contractantes devant elle; et, comme elle a déclaré le règlement légal, elle aurait dû confirmer le jugement de la Cour Supérieure.

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C’est là le jugement que nous croyons devoir rendre maintenant. L’appel est donc maintenu et le jugement de la Cour Supérieure est confirmé, avec dépens tant devant la Cour du Banc du Roi que devant cette Cour.

Appeal allowed with costs.

Solicitors for the appellant: Boulanger, Marquis & Lessard.

Solicitor for the respondent: L. G. Belley K.C.



[1] (1906) Q.R. 15 B.R. 257.

[2] (1884) 11 Can. S.C.R. 76, at pp. 88, 89.

[3] (1884) 11 Can. S.C.R. 76, at 89.

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