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Supreme Court of Canada

Sale of land—Sheriff's sale—Seizure super non domino—Encroachment—Public domain—Non-seizable—Expropriation—Dedication—Arts. 1590, 1591 C.C.—Art. 781 C.C.P.

A sheriff's sale discharges an immovable from all rights of ownership, except when the owner is, at the time of the sale, in possession of the immovable seized super non domino, as the right to revendication then belongs to such owner; and if, at the time of the seizure, the real owner is not in possession, he must, in order to retain his right of ownership, make an opposition to the sale in the usual way.

An encroachment however upon a real property constituting a mere holding de facto, and not a possession de jure, cannot invalidate a judicial seizure and sale made against the real owner, who in such a case must be reputed to be in possession animo domini. (Art. 699 C.C.P.); Dufresne v. Dixon, 16 Can. S.C.R. 596, and Vézina v. Lafortune, 56 Can. S.C.R. 246 dist.

The principle of law that an immovable forming part of the public domain cannot be seized or alienated does not apply when that immoveable has been so incorporated by unlawful process.

Except in cases of donation, or abandonment or sale by mutual consent, a municipal corporation to become owner of real property must previously and under pain of nullity perform all the formalities required for expropriation proceedings, and unless these have been rigourously executed, the owner of the property, who has been dispossessed against his will, is not restricted to a claim for an indemnity, but he may revendicate his property by way of action pétitoire.

An immovable affected by an hypothec cannot be legally dedicated by the owner to the public; and, in such case, Arts. 1590 and 1591 C.C. do not apply.

Judgment of the Court of King's Bench (Q.R. 37 K.B. 399) affirmed.

APPEAL from a decision of the Court of King's Bench, appeal side, province of Quebec[1], reversing the judgment of the Superior Court and maintaining the respondent's action.

The material facts of the case and the questions in issue are fully stated in the above head-note and in the judgments now reported.

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Laurendeau K.C. and St-Pierre K.C. for the appellant.

Lafleur K.C. and Dugas K.C. for the respondent.

The judgment of the majority of the court. (Anglin C.J.C and Duff, Mignault, Newcombe and Rinfret JJ.) was delivered by

Rinfret J.—Ferguson a poursuivi la cité de Montréal pour se faire déclarer seul et véritable propriétaire d'une lisière de terrain faisant partie de certains immeubles situés dans le quartier Côte des Neiges de cette cité, et portant les numéros officiels 1, 2 et 3 de la subdivision du numéro 162 du cadastre fait pour le village incorporé de la Côte des Neiges.

Il prétend que la cité occupe et possède cette lisière de terre illégalement et sans droit, et demande qu'elle soit condammée à l'évacuer, à lui en remettre la possession intégrale et à le restaurer dans la pleine jouissance de ses droits. A l'encontre des prétentions de Ferguson, la cité de Montréal n'a pas invoqué un titre de propriété. Elle s'est contentée d'alléguer sa prise de possession à la suite de pourparlers avec un M. Antoine Robert, au moment où ce dernier était propriétaire de la lisière de terre dont il s'agit. Elle a ajouté que, dans tous les cas, en tenant compte de cette prise de possession, tout ce que Ferguson pourrait exiger maintenant serait un montant représentant la valeur de cette lisière. La Cour Supérieure a été d'avis que Ferguson n'avait pas établi son titre à la propriété en question; et, comme conséquence, elle l'a débouté de son action.

La majorité de la Cour du Banc du Roi en appel (le juge-en-chef de la province de Québec étant dissident) a décidé, au contraire, que Ferguson avait acquis un titre à la lisière de terre qu'il revendique; que la cité de Montréal n'en était jamais devenue propriétaire; qu'elle l'avait admis; et qu'elle avait même reconnu le titre de Ferguson. En conséquence, la Cour du Banc du Roi a infirmé le jugement rendu par la cour de première instance et elle a maintenu les conclusions de l'action.

Le dossier est plutôt avare d'informations; et, avec le juge-en-chef de la province de Québec, il faut regretter que les renseignements fournis à la cour soient aussi restreints. Plusieurs faits essentiels auraient peut-être donné à la

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cause un aspect différent, s'ils eussent été expliqués. Cela ne permet pas cependant de baser la décision sur des suppositions; et, en dehors des présomptions que l'on peut légalement déduire des faits connus, il est nécessaire de demeurer dans le cadre limité des circonstances que les parties ont bien voulu dévoiler à l'enquête.

Le titre le plus ancien qui ait été produit remonte au 14 juin 1890. C'est un acte de vente par Octave Provost et autres à Antoine Robert. Il importe d'en extraire la description de la propriété vendue, car l'on verra que les actes subséquents ont tous procédé par voie de référence à cette description initiale. Elle se lit comme suit :

Un emplacement composé et formé des lots de terre portant les numéros un, deux et trois de la subdivision officielle du lot de terre portant le numéro cent soixante et deux (162-1-2 & 3) des plan et livre de renvoi officiels du cadastre pour le village incorporé de la Côte des Neiges, district de Montréal, avec la maison et dépendances construites sur les dits lots de subdivision, un et deux, avec droit pour le dit Robert et représentants de mettre et tenir en tout temps un tuyau d'un pouce sur les lots numéros cinq et six de la dite subdivision officielle, appartenant à Zéphirin Lapierre ou représentants, pour conduire l'eau de la source qui existe sur le dit numéro six sur les dits lots numéros un, deux et trois pour Futilité du dit Robert et représentants lequel emplacement contient environ cinq arpents de superficie plus ou moins, et est borné en front par le chemin public, et avec toutes les dépendances y attenant.

Antoine Robert, le 24 février 1905, par acte reçu devant maître Dunton, N.P., à Montréal, s'est reconnu endetté envers le révérend Anthony Johnston Provost en la somme de $25,000 et le révérend Henry en la somme de $21,000 qu'il promit leur rembourser dans les deux ans qui suivaient; et, comme garantie de ces obligations, il hypothéqua, en faveur de The Royal Trust Company, de Montréal, pour le compte des obligataires, plusieurs immeubles, parmi lesquels était compris celui qu'il avait acquis d'Octave Provost et autres le 14 juin 1890. Dans cet acte hypothécaire, l'immeuble qui nous occupe est décrit par les mêmes numéros officiels que dans l'acte d'acquisition, avec l'addition suivante:

as the whole is mentioned in the deed of sale consented to Antoine Robert by Octave Provost, and others, before M. J.A. Dorval, notary, on the fourteenth day of June, one thousand eight hundred and ninety and registered in the registry office for the counties of Hochelaga and Jacques Cartier under no. 36, 261.

Le 22 septembre 1906, Antoine Robert n'ayant pas rempli ses obligations, The Royal Trust Company fit signifier

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 à ce dernier une action dont les conclusions ses lisaient comme suit :

Wherefore plaintiff brings suit and prays that the defendant be adjudged to pay and to satisfy to it, in its said quality as trustee under the said act and deed of hypothec before Dunton, notary, under date of the 24th day of February, 1905, filed as plaintiff's exhibit P-I herein, and that the said property so hypothecated as aforesaid, and in detail described in paragraph 4 of the foregoing declaration, be seized and brought to judicial sale to the end that the plaintiff in its said quality may be paid by preference out of the price thereof, the said sum of fifty-eight thousand and seventy-four dollars and sixty cents, the whole with costs.

Une discussion s'est engagée devant la Cour du Banc du Roi, et également à l'audition devant nous, sur la nature exacte de cette action.

L'honorable juge-en-chef de la province de Québec, tout en admettant qu'il

existe une action appelée personnelle hypothécaire,

dans notre droit, et que

l'on peut combiner à la fois les conclusions de l'action personelle pour obtenir un jugement de condamnation contre le débiteur pour le paiement de la dette et les conclusions demandant le délaissement qui caractérise l'action hypothécaire,

était cependant d'avis que l'action du Royal Trust ne contenait pas les conclusions nécessaires pour être envisagée comme une action hypothécaire.

L'honorable juge Dorion était disposé à la considérer comme

une action personnelle hypothécaire, malgré le doute que peuvent faire naître ses conclusions à peine suffisantes.

L'honorable juge Tellier a exprimé l'opinion qu'une partie des conclusions étaient celles "d'une action réelle", parce que le Royal Trust réclamait

l'exercice d'un droit réel qui lui appartenait sur la chose d'autrui (et que) le droit de faire vendre les immeubles hypothéqués est de l'essence même de l'hypothèque. On peut exercer ce droit aussi bien contre le débiteur personnel, quand il est détenteur, que contre un tiers-détenteur.

Il réfère, dans ses notes, au sixième rapport des codificateurs, page 61, à Ferrière, Dictionnaire de Droit, verbo Hypothèque, p. 1061, et à Domat, tome 2, Hypothèque, page 23.

Nous avons fait cette digression à cause de l'importance que cette question a prise lors de l'argument; mais nous ne croyons pas devoir pousser davantage la discussion sur ce point, vu qu'elle n'est pas nécessaire pour la solution du litige.

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Le 25 avril 1908, le territoire, dans lequel se trouvait l'immeuble appartenant à Antoine Robert et hypothéqué en faveur de The Royal Trust Company, fut annexé à la cité de Montréal qui s'engagea, entre autres choses, à élargir le chemin de la Côte des Neiges par lequel cet immeuble était borné en front (Statut de Québec, 8 Ed. VII, c. 85, s. 1b, par. 3).

Le 5 août 1910, Antoine Robert offrit de céder à la cité de Montréal

tout le terrain nécessaire à cet élargissement à prendre sur les lots dont il était propriétaire,

parmi lesquels se trouvaient ceux qu'il avait hypothéqués en faveur de The Royal Trust Company. La superficie de la lisière de terre comprise dans cette offre y est mentionnée comme étant de 19,576 pieds. Le prix est fixé à soixante-quinze cents du pied pour

la valeur du terrain et tous les dommages;

et les conditions suivantes sont stipulées:

Je fais cette offre sans garantie et sujette à l'acceptation par les créanciers hypothécaires, si la chose est nécessaire.

Il est entendu que je prendrai la clôture actuelle et que je la placerai dans sa nouvelle position à mes frais. Cette offre est bonne jusqu'au 15ème jour d'août 1910.

Au moment de l'offre, l'action intentée par The Royal Trust était encore pendante. Aucune explication de ce long retard n'est fourni par le dossier.

Le 15 août 1910, délai extrême accordé à la cité de Montréal par Robert pour accepter son offre, la ville n'avait rien fait.

Mais le 15 septembre 1910, le bureau des commissaires a fait rapport recommandant l'acceptation de cette offre et que le maire et le greffier de la cité soient autorisés à signer les contrats conformément au plan préparé à cet effet par l'arpenteur-géomètre de la ville; et, le 27 septembre 1910, le conseil de la ville de Montréal, ayant pris connaissance du rapport des commissaires, résolut de l'adopter suivant sa forme et teneur.

Ce qui s'est passé par la suite est resté dans l'obscurité.

Nous savons seulement que les intéressés n'ont pas donné suite à la résolution du conseil. Elle n'a jamais été notifiée à Antoine Robert. Aucun acte de vente n'a été consenti. Ni l'une, ni l'autre des parties n'a fait la moindre démarche pour qu'il le soit. Le prix de vente n'a été ni payé, ni

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réclamé par Robert, ni offert par la ville. Le montant est resté dans la caisse municipale. On ignore s'il a continué de figurer dans les prévisions budgétaires de la ville. On ne sait même pas s'il est encore disponible soit en fait, soit en conformité avec les exigences de la charte.

Dans son plaidoyer, la cité de Montréal ne nous dit pas ce qu'il en est advenu. Elle se contente de soumettre que, dans tous les cas, vu la prise de possession du terrain, Ferguson ne pourrait plus réclamer qu'un

montant représentant la valeur desdits lots.

Bien plus, comme nous aurons l'occasion de le voir plus loin, assignée dans une saisie-arrêt après jugement, la cité de Montréal a déclaré "ne rien devoir" à Robert.

Le 23 décembre 1910, The Royal Trust Company obtint son jugement contre Robert devant la Cour Supérieure. L'action était donc restée en suspens au delà de quatre ans. Pourquoi? Nous l'ignorons. Il y a eu inscription en revision et le jugement initial fut confirmé le 25 janvier 1913. Le dossier ne nous révèle pas si Robert avait produit un plaidoyer à l'encontre de l'action.

Dans l'intervalle, la ville avait pris possession de la lisière de terrain. Mais elle ne s'est pas même donné la peine de nous dire quand, ni comment. Il est clair cependant qu'elle devait posséder toutes ces informations; et si elles étaient de nature à améliorer sa cause, elle seule devra en souffrir. Elle s'est bornée à faire entendre un assistant-ingénieur qui n'avait pas une connaissance personnelle des faits et qui n'occupait pas cette position lorsqu'ils se sont passés. Il nous dit, "d'après les rapports", que le chemin de la Côte des Neiges a dû être élargi en 1911 et que le macadam y a alors été "construit". Il n'a

pas eu connaissance personnellement que la cité ait fait un acte de possession avant 1912 (et, à ce moment-là), la clôture semblait avoir été déplacée.

C'est sa conclusion, après qu'il eut constaté:

C'est comme si elle avait été déplacée; il y avait deux broches, je pense, et les piquets semblaient se tenir à peu près.

Nous n'en savons pas plus long. Cette version n'implique nullement que Robert a déplacé la clôture. Il eût été important d'élucider ce fait, puisque, dans son offre, Robert avait convenu :

Il est entendu que je prendrai la clôture actuelle et que je la placerai dans sa nouvelle position, à mes frais.

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S'il l'eût fait, on eut pu en déduire qu'il avait conclu le contrat avec la ville, malgré l'expiration du délai qu'il avait fixé dans son offre. Mais le maigre renseignement fourni par l'assistant-ingénieur de la ville s'accommode peut-être mieux encore de l'idée que les employés de la ville auraient tout simplement reculé la clôture, en s'emparant du terrain pour faire le chemin, comme le suggèrent ces "deux broches" avec piquets qui "semblaient se tenir à peu près". Robert, pour placer la clôture "dans sa nouvelle position", eut sans doute installé une clôture réelle et solide.

En tout cas, il y avait là un point à approfondir qui eût pu éclaircir la situation. Tel qu'il est, il peut être interprété tout aussi bien comme un second acte d'empiètement de l'appelante que comme un fait tendant à démontrer une renonciation au délai par Robert. C'est dire qu'il reste inutile comme élément dans la solution de cette cause.

Toute information sur les agissements de Robert à cette époque-là fait absolument défaut. Il n'y a pas l'ombre d'une preuve qu'il ait vu ou su que la ville s'était emparée de son terrain. Nous ne savons même pas ce qu'il est devenu; car il n'est plus question de lui par la suite. La présomption est qu'il s'est désintéressé de toute l'affaire, parce que l'hypothèque consentie au Royal Trust absorbait toute la valeur de son immeuble, et dès que le jugement eût été rendu en vertu de cette hypothèque par la Cour Supérieure, le 23 décembre 1910, le parti qui pouvait être tiré d'une vente à la ville concernait plutôt les créanciers hypothécaires, pour qui le Royal Trust agissait comme fiduciaire, et à l'acceptation de qui Robert avait assujetti son offre à la ville, "si la chose était nécessaire".

Il suffit de signaler que l'enquête n'a dévoilé aucun acquiescement même tacite de la part de Robert à l'empiètement commis par la ville.

Le Royal Trust a fait saisir la propriété de Robert par un bref de terris émis le 15 avril 1913. Nous n'avons pas le procès-verbal de saisie, mais nous avons l'avis de vente publié par le shérif, le 21 mai 1913. Il décrit la propriété qui va être vendue de la même façon que dans l'acte originaire de Provost à Robert, auquel d'ailleurs il réfère par le nom du notaire qui l'a reçu, la date, le numéro d'enregistrement et le bureau où il a été enregistré.

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La vente par le shérif a eu lieu le 26 juin 1913. L'acte est produit et suit textuellement la description de l'avis public et de la vente de Provost à Robert, y compris la superficie qui demeure invariablement fixée à "environ cinq arpents, plus ou moins". The Royal Trust se porta adjudicataire.

A la suite de cette vente, la cité de Montréal produisit entre les mains du shérif une réclamation pour les taxes municipales dues pour les années 1911 et 1912 sur la totalité des lots de Robert (sans restriction). Elle a admis en avoir été payée. L'on remarquera que ces deux années sont subséquentes à l'époque où elle avait prétendu accepter l'offre de Robert et même, à sa prise de possession de la lisière de terrain.

Le 15 juin 1921, The Royal Trust a vendu à Ferguson la propriété acquise à la vente par le shérif; et, dans l'acte, la description est identique à celle de tous les autres actes depuis Provost jusqu'au shérif.

Ferguson y est décrit comme résidant à London, Ontario.

Le 20 juillet suivant, la cité de Montréal, assignée comme tiers-saisie par The Royal Trust tentant de collecter la balance de son jugement contre Robert (suivant l'allusion déjà faite plus haut), "déclare ne rien devoir" à Robert, mais en plus "expose ce qui suit":

Le 5 août 1910, Antoine Robert offre de céder à la cité de Montréal, tout le terrain nécessaire à l'expropriation du chemin de la Côte des Neiges, pour la somme de $14,682, le terrain à prendre sur les lots suivants, savoir :

1. sur le lot no. 11, 13,919 pieds;

2. sur le lot no. 162-3, 2,174 pieds;

3. sur le lot 162-2, 1,862 pieds;

4. sur le lot 162-1, 1,621 pieds, faisant un total de 19,576 pieds à 75c. du pied, comprenant la valeur du terrain et tous les dommages à souffrir pour l'élargissement du chemin.

Le 15 août (évidemment une erreur pour "septembre"), 1910, un rapport du bureau des commissaires a été soumis au conseil et adopté le 27 septembre, 1910, mais le défendeur a toujours négligé de passer titre.

En 1912, le lot no. 11 soit 13,919 pieds a été acheté par la cité du Royal Trust Co. au prix de $10,000.

Le 23 octobre 1913, le Royal Trust Co. est devenu propriétaire par vente au shérif des lots nos. 162, subd. 1, 162, subd. 2, 162, subd. 3 du cadastre de la Côte des Neiges, sur la personne d'Antoine Robert, en vertu d'un jugement en date du 13 décembre, 1910, confirmé par la Cour de Revision le 25 janvier 1913.

Le 15 juin 1921, le Royal Trust a vendu à Malcolm M. Ferguson, les lots 162-1, 162-2, 162-3 du cadastre de la Côte des Neiges.

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Cette déclaration est fort significative; mais on doit y signaler surtout l'information que le lot n° 11

a été acheté par la cité du Royal Trust au prix de $10,000.

Or, ce lot faisait partie de l'offre de Robert, en date du 5 août 1910, comme la déclaration le dit elle-même. Si la cité a cru devoir, plus tard, l'acquérir du Royal Trust, c'est donc qu'elle considérait elle-même que la convention avec Robert n'avait jamais été complétée. Et il est difficile de voir pourquoi les autres lots mentionnés dans la même offre seraient traités différemment.

Vainement, la cité prétendrait que cette déclaration émane d'un simple employé. Elle a été faite de la même manière que dans le cas de toutes les corporations; et c'est l'acte de la cité par son représentant dûment autorisé.

La vente par le shérif avait été enregistrée le 25 octobre 1913; celle du Royal Trust à Ferguson le fut le 16 juillet 1921. Le certificat de recherches ne révèle aucune autre inscription au bureau d'enregistrement.

La présente action a été instituée le 1er septembre 1921.

Voilà, dans leur ordre chronologique, tous les faits que nous possédons.

Il faut évidemment commencer par scruter le titre de Ferguson; car si l'intimé ne peut démontrer qu'il possède un titre, il ne peut discuter celui de l'appelante. C'est d'ailleurs ainsi qu'a procédé le tribunal de première instance, qui, étant arrivé à la conclusion que le titre de Ferguson était nul, n'a pas poussé plus loin son investigation.

Nous sommes d'accord avec la majorité de la Cour du Banc du Roi pour dire que Ferguson a un titre à la lisière de terrain en litige.

En remontant à l'acte de vente de Provost et autres à Antoine Robert (14 juin 1890), le plus ancien qui ait été versé au dossier, on trouve la description de l'immeuble comprenant alors d'une façon indiscutable la lisière dont il s'agit.

Cette description a été reproduite dans l'acte hypothécaire consenti par Robert au Royal Trust. A ce moment-là (24 février 1905), il n'était pas question de la cité de Montréal, et il est clair que les parties contractantes avaient en vue d'hypothéquer tout le terrain que Robert avait acquis de Provost et autres.

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Partant de là, à moins de trouver dans la rédaction des actes subséquents une restriction dans la description de la propriété (ce que l'on y chercherait en vain), il nous paraît d'une logique inéluctable que la propriété à l'égard de laquelle The Royal Trust a pris des conclusions dans son action du 26 septembre 1906, celle qui a fait l'objet des jugements de la Cour Supérieure et de la Cour de Revision, puis de la saisie et de la vente judiciaires, celle que le shérif a entendu transmettre au Royal Trust comme adjudicataire et que ce dernier a ensuite vendue à Ferguson, est identiquement la même. The Royal Trust, en demandant dans son action contre Robert

that the property so hypothecated as aforesaid and in detail described in paragraph 4 of the foregoing declaration be seized and brought to judicial sale to the end that the plaintiff in its said quality may be paid by preference out of the price thereof, etc.,

s'adressait de toute évidence à la propriété intégrale, puisque cette déclaration date de 1906 et que la cité de Montréal n'est entrée en cause qu'en 1910. C'est donc bien la propriété intégrale, sans abstraction de la lisière occupée par la cité, la propriété intégrale sur laquelle portait son hypothèque, que le Royal Trust a fait saisir et vendre en vertu des jugements qu'il a obtenus.

Ce raisonnement ne saurait être entamé par le seul fait que la description dans l'acte du shérif s'accompagne des mots: "bounded in front by Côte des Neiges road". C'est la même idée que la description du premier titre: "borné en front par le chemin public". Les deux expressions ont en vue la même limite; et cela est bien indiqué par l'addition dans la description

as the whole is mentioned in the deed of sale consented to Antoine Robert by Octave Provost and others before Mr. J. A. Dorval, notary, on the fourteenth day of June, 1890, registered, etc., under no. 36261.

Cela résulte aussi du fait que la superficie mentionnée est la même dans l'acte du shérif et dans l'acte à Ferguson que dans le titre de Provost à Robert.

Les mots: "as the said property now subsists", que l'on trouve dans le titre de Ferguson ne s'adressent ni à la superficie, ni à la description de la propriété, mais à son état et à sa condition. La vente comprenait

the house and other buildings thereon erected;

et c'est évidemment par rapport à ces constructions que la clause a été insérée. Cela explique pourquoi personne n'y

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a attaché d'importance et que l'attention n'y a été attirée, pour la première fois, que lors de l'audition devant cette cour.

Et ce n'est pas ainsi, non plus, que l'appelante a interprété le titre de Ferguson. Bien loin d'alléguer que ce dernier n'avait pas acquis cette lisière de terrain, la cité de Montréal a admis implicitement que la vente du shérif, puis celle du Royal Trust à l'appelant, incluaient cette lisière; et elle a prétendu que Ferguson n'y avait pas droit parce que ces deux ventes étaient nulles et illégales. C'est également le motif du jugement de la Cour Supérieure sur ce point.

Cette illégalité et cette nullité résulteraient de ce que la saisie et la vente judiciaires auraient été faites super non domino quant à la lisière de terrain dont la ville s'était emparée, et par application des articles 613 et 699 du Code de Procédure Civile.

Cette vente par le shérif a eu lieu le 26 juin 1913. En vertu de sa publicité, une vente judiciaire doit être tenue pour avoir été connue de tous. En plus, la cité de Montréal a, de fait, eu connaissance de celle-ci dès qu'elle a eu lieu, puisqu'elle a remis au shérif sa réclamation pour taxes dues par l'immeuble vendu. Or, ce n'est que huit ans après, le 6 octobre 1921, que, dans son plaidoyer, elle attaque indirectement la légalité de cette vente. (Guyon v. Lionais[2].

Le caractère de sécurité qui s'attache, dans la province de Québec, à un titre provenant du shérif donne lieu de se demander si l'on peut de cette façon mettre en doute sa validité. Puisque le décret purge même le droit de propriété (Pothier, 3e éd., Bugnet, v. 10, n° 638; Renaud v. Denis[3], Ville d'Outremont v. Cabana[4], en dehors du cas de procédure ultra vires, comme celles que cette cour eut à examiner, par exemple, dans la cause de Lambe v. Armstrong[5], on ne devrait pas admettre sans une étude approfondie qu'un titre du shérif soit absolument nul ab initio, qu'il ne soit pas nécessaire, au moins, de le faire déclarer nul par les tribunaux (Perrault v. Chevalier) [6], et qu'il ne faille pas

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pour cela s'adresser à eux de la manière et dans les délais prévus par les articles 784 et suivants du Code de Procédure (Pothier, 3e édition, Bugnet, vol. 10, n° 658, p. 300, 2e al. et n° 659). L'arrêt re Lambe v. Armstrong[7] est là comme précédent pour indiquer qu'il ne s'agit pas, dans ce cas, d'une simple question de procédure.

Mais nous voulons, pour le moment, mentionner seulement que cet aspect de la question ne nous a pas échappé et que nous en réservons la décision pour un cas où la solution du litige l'exigera. Cela ne se présente pas ici, car nous sommes d'avis que la vente faite en l'espèce par le shérif ne saurait être mise de côté pour l'unique raison invoquée par la cité de Montréal.

Si, comme la majorité de la Cour du Banc du Roi le croit, l'action de Royal Trust contre Robert était une action hypothécaire ou en déclaration d'hypothèque, le jugement obtenu pouvait, sans l'ombre d'un doute, être exécuté sur l'immeuble affecté par l'hypothèque, sans tenir compte de la prétendue possession de la ville (Art. 614 C.P.C.; Arts. 2016, 2074 C.C).

Mais, indépendamment de la nature de l'action de Royal Trust contre Robert, il nous paraît que le Royal Trust, après avoir obtenu jugement contre Robert, avait le droit, dans le cas actuel, de faire saisir et vendre la totalité des lots en question, comme immeubles de son débiteur.

Les biens du débiteur sont le gage commun de ses créanciers et il est tenu vis-à-vis d'eux de remplir son engagement sur tous ses biens mobiliers et immobiliers, présents et à venir (Arts. 1980, 1981 C.C.). Le créancier qui a obtenu jugement contre son débiteur peut faire saisir et vendre, pour satisfaire à tel jugement, les biens meubles et immeubles de ce débiteur (Art. 1585 C.C.; Art. 613 C.P.C.)

Ici, Robert rencontrait toutes les exigences pour que la saisie fut valide.

Il était le propriétaire enregistré et il était réputé posséder animo domini (Ville d'Outremont v. Cabana[8]. L'empiètement de la cité de Montréal, étant peut-être une détention de facto, mais certainement pas (comme nous nous proposons de le démontrer) une possession de jure, ne

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pouvait faire obstacle à la légalité de la saisie et de la vente judiciaires.

La cité de Montréal, avec toutes les circonstances qu'elle connaissait et que nous avons énumérées au commencement n'avait certainement pas, au sens juridique, une possession contraire à celle de Robert. Elle ne pouvait ignorer le droit supérieur de Robert. Il y avait, chez elle, absence d'animus, comme l'a démontré sa déclaration sur la saisie-arrêt après jugement. (Voir Fuzier-Herman, Répertoire, vo. Possession, nos 2, 3, 4).

Référons à Pothier, 3e édition Bugnet vol. 10, n° 526:

La saisie réelle doit se faire sur le propriétaire de l'héritage ; une saisie faite super non domino est nulle. Observez néanmoins qu'on entend par propriétaire, non pas seulement celui qui l'est dans la vérité, mais encore celui qui possède l'héritage animo domini, soit qu'il en soit véritablement propriétaire, soit qu'il ne le soit pas; car il est réputé l'être, lorsque le véribable propriétaire ne réclame point; ce qui suffit pour que la saisie faite sur lui soit valable et purge même le droit du véritable propriétaire, s'il ne s'y oppose pas.

Et Bugnet ajoute, dans une note:

Contre le propriétaire apparent, sauf le droit de revendication de la part du propriétaire véritable, qui pourra même, en règle générale, demander la nullité de l'adjudication, v. art. 717 c. proc. par. 1, l'adjudication (sur saisie immobilière) ne transmet à l'adjudicataire d'autres droits à la propriété que ceux appartenant au saisi.

C'est dire clairement qu'une saisie ne sera pas nulle, si elle est pratiquée sur un possesseur animo domini, pour la seule raison qu'il ne serait pas le véritable propriétaire; sauf le droit de revendication réservé à ce dernier. Et cette doctrine de Pothier est également celle qui est enseignée par Pigeau (vol. I, p. 779) et d'Héricourt (Traité de la vente des immeubles par décret, tome premier, p. 47). Mais c'est dire également que la saisie sur le véritable propriétaire, en exécution d'un jugement qui l'a condamné, est l'exercice normal du droit du créancier sur son gage, au sens de l'art. 1981 du Code civil, et que jamais une vente judiciaire, à la suite d'une pareille saisie, ne sera déclarée nulle à la demande d'un usurpateur comme la ville de Montréal, qui n'a même pas jugé à propos de se servir de l'opposition à la saisie.

La situation qui résulte du décret est bien expliquée dans le passage suivant du jugement de l'honorable juge Fournier re McGregor v. The Canada Investment and Agency Co.[9].

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D'après la loi et les décisions dans la province de Québec la vente judiciaire accompagnée des formalités légales donne un titre complet et absolu à l'adjudicataire de la propriété vendue et purge tous les droits dont la propriété peut être grevée, à l'exception de l'hypothèque résultant de la commutation des rentes seigneuriales, de l'emphytéose, des substitutions non ouvertes et du douaire coutumier non ouvert. Par l'art. 711 C.P.C. le décret purge tous les autres droits.

Comme il a été déjà dit plus haut, le testament McGregor ne contenant pas de substitution, la vente judiciaire a eu son plein et entier effet et a purgé les droits du propriétaire faute d'avoir fait opposition à la vente en temps opportun. On ne trouvera pas de décision de nos cours contraires à ce principe mais on en trouve qui le soutiennent hautement.

Dans une cause de Patton v. Morin[10], où la nullité d'un décret était demandée comme fait super non domino il a été jugé: 1. que le décret purge un immeuble de tous les droits de propriété, excepté dans le cas où le propriétaire est lors du décret en possession de l'immeuble saisi super non domino; 2. que si au moment de la saisie de l'immeuble le vrai propriétaire n'en est pas en possession, il doit, pour conserver son droit de propriété s'opposer à la vente par les moyens ordinaires. Un des considérants de ce jugement est comme suit: "Considérant que la vente judiciaire accompagnée des formalités légales, doit être respectée et ne peut être révoquée en droit sans porter atteinte à l'efficacité d'un titre accordé par les mains de la justice, la cour maintient la défense du défendeur et renvoie l'action du demandeur."

Un autre considérant affirme le principe que le demandeur aurait dû se porter opposant à la saisie et vente du dit immeuble, mais qu'au contraire il a laissé vendre et adjuger le dit immeuble en justice sans formuler sa plainte et s'opposer à la dite saisie et vente.

Il s'agit ici d'un cas bien différent de ceux de Dufresne v. Dixon[11] et Vézina v. Lajortune[12], sur lesquels la Cour Supérieure a voulu appuyer sa décision dans la présente cause.

Dans chacun de ces arrêts, cette cour a reconnu à celui qui, lors du décret, avait à la fois le titre de propriété et la possession, le droit de revendiquer son immeuble contre l'adjudicataire à une vente judiciaire faite sur la tête d'un saisi, non possidente i.e. qui n'était même pas "propriétaire apparent", suivant l'expression de Bugnet.

Nous laisserons à l'honorable juge Taschereau, qui a siégé dans la cause de Dufresne v. Dixon11 et dans la cause de McGregor v. The Canada Investment & Agency Co.[13] le soin d'indiquer lui-même la distinction entre les deux:

I am also of opinion that, as held by the court below, the plaintiff, being of age at the time of the sheriff's sale to the defendant (though I do not see what difference that makes), was bound then to oppose the

[Page 238]

sale and assert his right, if he had any; that his default to do so precludes him from now attacking the validity of the defendant's title, as this sale has been accompanied with all the formalities required by law, and as Craig upon whom it has been made was then in possession as proprietor of the said lot in virtue of duly registered authentic deeds. The case of Dufresne v. Dixon[14], cited by the appellant was totally different from the present one, as a reference to the report will clearly show.

There the sheriff had sold Mrs. Dixon's property to which she had a title and of which she was in possession, and so having both title and possession the sheriff's sale thereof against another person was annulled. Here the actual possession was in Devlin, but by the registry office the title was in Craig. Now, under these circumstances, Devlin's possession was Craig's possession. Upon Craig alone could that property be sold, as it was so sold. If at the period of the seizure of an immovable the proprietor is not in possession thereof he must, for the preservation of his rights of property, oppose the sale by the usual means. Such is the law as laid down in the case of Patton v. Morin[15], to which we must give application in the present case. Assuming that he had rights to this property the appellant has lost them by the sheriff's sale. Vigilantibus non dormientibus subvenit lex. In Rodière, Proc. Civ. (2 vol. p. 292) and Bériat de St. Prix (2 vol. p. 658), inter alias, the difference between the old and the new law in France on this subject is pointed out.

De même, re Vézina v. Lafortune[16], Vézina, lors du décret contre Senneville, avait le titre de propriété en son nom et il avait la possession de l'immeuble saisi et vendu pour la dette de Senneville. La cour, étant d'avis que Vézina avait tout le temps continué d'être en possession à titre de propriétaire, annula, à sa demande, une saisie et une vente faites sur Senneville, en vertu d'un jugement condamnant Senneville, qui n'était pas en possession.

Dans chacun de ces arrêts, elle a mis de côté un décret qui avait porté, suivant l'expression de Verdier (vol. 2, "Transcription hypothécaire", n° 299),

sur un bien qui n'était plus dans le patrimoine du débiteur

et qui avait suivi une saisie faite super non possidente. Elle l'a fait à la demande du propriétaire ayant titre et possession.

C'était appliquer le principe du droit dé revendication que Bugnet reconnaît plus haut et que l'on trouve également dans Pigeau (Procédure du Châtelet, tome premier, p. 779):

Quand on dit que le décret purge la propriété non réclamée, cela ne s'entend que du cas où celui à qui elle appartenait a été constitué en demeure de la faire connaître; et il ne l'est pas, tant qu'on le laisse en possession de son bien, quand même ce bien aurait été compris dans la

[Page 239]

saisie-réelle, les affiches, l'enchère et toutes les poursuites. Bardet, tit. I, liv. I, c. 7, et après lui d'Héricourt, page 49, rapportent un arrêt du 14 février, 1627, qui l'a ainsi jugé. C'est l'avis de Gourget, en son traité des Criées, et cela parait conforme à la raison. Ce propriétaire, ne se voyant pas dépossédé, a dû croire naturellement qu'on ne pouvait le dépouiller sans l'actionner, et il a pu ignorer que son bien fût saisi, n'ayant pas été averti d'une manière sensible et non équivoque.

Mais il y a loin entre le cas où, sur l'instance du propriétaire en possession lors du décret, ce dernier est mis de côté parce qu'il a été exécuté pour la dette d'une autre personne qui n'était pas en possession, et la demande actuelle de la cité de Montréal, qui, n'ayant d'autre base que son usurpation, voudrait faire déclarer nulle une saisie pratiquée sur Robert, véritable propriétaire dont le titre est enregistré, et une vente en exécution d'un jugement condamnant ce même Robert à payer une dette garantie par hypothèque sur l'immeuble ainsi saisi et vendu. (Perreault v. Chevalier[17].

Nous sommes donc d'avis qu'il n'appartenait pas à la cité de Montréal de demander l'annulation de la saisie et de la vente judiciaires par lesquelles The Royal Trust a acquis la lisière de terrain en litige. Le titre conféré par le shérif était régulier et valide; et Ferguson, qui détient ce titre du Royal Trust, a établi son droit de propriété sur la lisière en question.

Il va sans dire que nous n'écartons nullement le principe de l'inaliénabilité du domaine public, dont il est traité avec tant d'autorité dans l'opinion dissidente de l'honorable juge-en-chef de la province de Québec. Nous faisons simplement la distinction entre une propriété qui est devenue légalement une partie du domaine public et celle qui y a été incorporée sans droit. Toute notre discussion jusqu'ici est basée sur notre opinion (qu'il nous reste à développer) que la cité de Montréal n'a jamais acquis de droits sur la lisière de terrain qui nous occupe. L'honorable juge Lafontaine est d'avis contraire; et c'est, en somme, cette divergence de vues sur ce point essentiel qui est à la base de la différence dans les solutions. Il ne paraît être entré dans l'idée de qui que ce soit que la ville pouvait arbitrairement incorporer cette lisière dans son chemin et, par le fait même, fermer

[Page 240]

la porte aux revendications ou à l'exercice des droits des intéressés, en vertu du principe de l'inaliénabilité.

Dans l'arrêt rendu par la Cour de Revision (Torrance, Papineau et Loranger JJ.) en La Banque d'Hochelaga v. Compagnie du Chemin de fer de Montréal, Portland & Boston[18], on répète jusqu'à satiété dans le rapport que la compagnie de chemin de fer avait pris possession "avec le consentement des propriétaires", et le fond du jugement est résumé dans le considérant suivant (p. 583) :

Considérant que, si les propriétaires ne peuvent refuser de céder la propriété de leurs terrains et d'en livrer la possession à la compagnie, moyennant telle indemnité, il ne leur est pas loisible d'en réclamer la propriété et de s'en faire restituer la possession, lorsqu'ils ont volontairement laissé la compagnie prendre possession du sol et y asseoir son chemin de fer; et que la seule chose qu'ils puissent légalement demander alors est l'indemnité, qui est censée représenter, tant pour eux que pour leurs créanciers, la propriété qu'ils avaient et dont ils ont ainsi laissé prendre possession.

Avec la majorité de la Cour du Banc du Roi, nous sommes d'avis que les circonstances établies dans la cause actuelle ne permettent pas de dire que Robert a volontairement laissé la ville prendre possession de son terrain.

Et même une corporation municipale ne saurait fonder son titre sur une simple usurpation—sauf si elle persiste assez longtemps pour atteindre la période de la prescription acquisitive.

En l'espèce, la cité de Montréal ne réclame pas la prescription; et, d'ailleurs, il est évident que la durée de sa prétendue possession ne le lui permettrait pas.

Le fait est qu'il est difficile, à l'examen de son plaidoyer, de savoir exactement en vertu de quel titre elle affirme ses prétentions.

Elle allègue l'offre de Robert, les résolutions du bureau des commissaires et du conseil, et sa prise de possession.

Elle ne tente pas de justifier cette possession par l'abandon ou "dédication" du propriétaire. Il est clair, d'après les circonstances exposées au début, qu'elle essaierait vainement d'abriter ses droits derrière cette doctrine. Robert ou The Royal Trust n'ont jamais eu

l'intention de donner au public le droit de jouir de sa propriété comme chemin,

[Page 241]

(Brodeur J. re Gauvreau v. Page[19]. Voir aussi Anglin J. re Harvey v. Dominion Textile Co.[20], 59; et Mignault J. re Gauvreau v. Page19, p. 198.

D'ailleurs, l'existence de l'hypothèque du Royal Trust eût empêché tout abandon efficace de la part de Robert. Quelle que soit la portée des articles 1590 et 1591 du code civil, ils exigent au moins une vente forcée ou une expropriation. Un simple abandon du propriétaire ne saurait prévaloir contre les droits hypothécaires d'un tiers, qu'il ait ou non commencé à les exercer au moyen d'une action hypothécaire ou d'une action en déclaration d'hypothèque.

Il ne reste donc à la cité de Montréal qu'une prétention possible, et ce serait qu'elle aurait acheté de Robert la lisière de terrain en question.

Disons tout de suite qu'il n'y a pas eu d'expropriation et qu'on n'en a même pas commencé les procédures.

Les statuts 8 Ed. VII, c. 85, s. 1, par. 3 et 1 Geo. V, c. 48, s. 3, n'ont rien ajouté aux droits de la ville. Ils n'ont fait que lui imposer l'obligation d'élargir le chemin de la Côte des Neiges ; mais ils ne lui ont conféré, pour ce faire, aucuns pouvoirs spéciaux. Il y est dit seulement que, si elle est forcée d'avoir recours à une expropriation, elle devra procéder en vertu de la loi 54 Viet., c. 38. C'est la loi d'expropriation, applicable (sauf exceptions) à toute la province de Québec, et qui, en 1909, s'est trouvée incorporée dans les articles 7581 et suivants des statuts refondus.

Pour les besoins de cette cause, il suffit de signaler que, même si elle avait adopté des procédures en expropriation, la ville, en ce qui concerne la possession du terrain, eût été régie par les articles suivants de la loi:

7595. Sur le paiement ou l'offre légale de l'indemnité ou de la rente annuelle adjugée à la partie qui y a droit, ou sur le dépôt en cour du montant de cette indemnité en la manière ci-dessus mentionnée, la sentence arbitrale donne à la partie en faveur de laquelle elle a été rendue, le pouvoir de prendre possession immédiate des terrains, et d'exercer les droits ou de faire les choses pour lesquelles l'indemnité ou la rente annuelle a été accordée. Si quelque résistance ou opposition est faite à la prise de possession de tels terrains ou l'exercice de tels droits, le juge peut, sur preuve satisfante de la sentence arbitrale, adresser son mandat, au shérif du district ou à un huissier, suivant qu'il le trouve convenable, pour mettre en possession la partie qui y a droit et pour faire cesser toute

[Page 242]

résistance ou opposition,—ce que doit faire le shérif ou l'huissier, en prenant avec lui l'assistance suffisante.

Le juge ne doit accorder ce mandat que lorsqu'un avis du temps et du lieu auxquels la demande lui en est faite a été signifié dix jours d'avance au propriétaire du terrain, au curateur s'il est absent, ou à la personne ayant droit d'en passer titre translatif, ou ayant un intérêt dans le terrain à exproprier.

7596. Un cautionnement doit être donné par un dépôt dans une banque constituée en corporation désignée par le juge, d'une somme suffisante à sa discrétion, pour défrayer l'indemnité accordée et tous les frais de procédure sur l'incident.

7597. La requête, le mandat de possession, le certificat de dépôt ci-dessus mentionné et tous autres documents se rapportant à telle procédure incidente, doivent rester dans les archives de la cour supérieure du district où telle procédure est faite, et un registre spécial de telle procédure est tenu par le protonotaire.

Nulle partie du dépôt ou de l'intérêt qui en provient ne doit être remboursée ou payée à la partie, ni payée au propriétaire du terrain, sans un ordre du juge, qui est autorisé à l'émettre.

7598. Tout propriétaire qui n'est pas payé intégralement, en capital, intérêts et frais, du montant qui lui est accordé par la sentence arbitrale, dans deux mois de la reddition de cette sentence, peut exercer son recours contre la personne, compagnie ou corporation, pour recouvrer la propriété et la possession de son terrain ou de son droit, par action civile ordinaire dans laquelle il peut demander les dommages que de droit.

Mais, comme il n'y a pas eu d'expropriation, il faut chercher dans le code civil ou dans la charte de la cité de Montréal le principe du droit que cette dernière prétend s'arroger ici.

Il n'y a certainement pas eu vente de Robert à la cité. Sans doute, le consentement des parties était suffisant, et le seul fait que Robert eut "négligé de passer titre" n'était pas concluant. Mais, sans prononcer d'opinion sur l'obligation de traiter avec les créanciers hypothécaires (qui pourrait être considérée comme une des conditions de l'offre de Robert), il fallait pour que la vente fût "parfaite" (Art. 1472 C.C.) que l'acceptation de la cité fût manifestée ou communiquée à Robert. Cela n'a pas été fait; et ce motif du jugement de la Cour du Banc du Roi nous paraît bien fondé.

Il n'y a aucune preuve que Robert ait eu connaissance de la résolution par laquelle la cité prétendait accepter. Et, à supposer qu'il eût pu être lié par la publicité, il est à remarquer que les règlements de Montréal sont suivis d'un avis public (art. 301 de la charte), mais rien n'exige la même chose pour une résolution; et aucun avis de celle dont il s'agit ne paraît avoir été publié.

[Page 243]

Il y a cependant une objection encore plus sérieuse à la prétention de l'appelante. La résolution de son conseil municipal n'a été adoptée que le 27 septembre 1910. Or, Robert avait mis dans son offre la stipulation suivante :

cette offre est bonne jusqu'au 15eme jour d'août 1910.

Il s'ensuit que, lorsque la ville a prétendu accepter l'offre, cette dernière n'existait plus. Au moment de son acceptation, la ville ne pouvait plus contraindre Robert. On n'a qu'à se demander si, dans les circonstances, la ville eût pu poursuivre Robert en passation de titre. La réponse négative s'impose.

Ferguson a le droit d'opposer à la ville ce défaut d'acceptation en temps utile, puisque, ayant lui-même un titre à la lisière en question, il peut se prévaloir des défauts du prétendu titre que la cité lui oppose.

Il n'y a donc pas eu de vente de Robert à la ville. Cela dispense de se demander si une pareille vente, au cas où elle aurait existé, aurait eu le caractère nécessaire pour permettre à l'acquéreur d'invoquer le bénéfice de l'article 1590 du code civil.

Mais prétendrait-on que Robert, par sa conduite subséquente, peut être tenu pour avoir renoncé au délai qu'il avait fixé dans son offre ou au droit qui lui appartenait de recevoir un avis d'acceptation de la ville?

En l'espèce, cette renonciation ne pourrait s'induire que de son silence, car, comme nous l'avons déjà fait remarquer, la preuve ne révèle de sa part aucune démarche postérieure à son offre. Depuis ce moment-là, il disparaît complètement.

En droit, nous déciderions que pareille renonciation implicite de la part de Robert ne pourrait être opposée au Royal Trust, créancier hypothécaire, ni au titre du shérif résultant d'une vente judiciaire provoquée par ce créancier hypothécaire.

En fait, la position de Robert était aux antipodes de celle de Michaud v. City of Montreal jugée par le Conseil Privé[21]. A supposer que les principes servant de guides à une "Court of Equity", qui paraissent avoir inspiré le Conseil Privé dans cette cause, puissent être appliqués à un litige régi par la loi de la province de Québec, il reste que

[Page 244]

Michaud était maire de la cité de Maisonneuve, lorsque le conseil municipal avait adopté la résolution par laquelle elle acceptait son offre; que non seulement il avait eu ainsi pleinement connaissance de cette résolution, mais qu'il avait même initialé le projet de contrat préparé à la suite par le notaire représentant la cité; et qu'il était encore maire, lorsque Maisonneuve prit possession de sa propriété,

and proceeded to throw it into a public way, to pave it and otherwise to fit it for the public use.

Il avait donc, on peut le dire, participé à la prise de possession par la ville. Dans ces circonstances, il fut décidé non pas même que la ville était devenue propriétaire par suite de sa prise de possession, mais que nos tribunaux

will not permit a man, afterwards, to assert his title to the land in question.

Et lord Cave ajoute (p. 418) :

A point was made by the counsel for the appellant based on the formalities required for the exercise of the compulsory powers to take land given by the statute law; but those formalities cannot be applicable to a case like the present, where there was no compulsory taking, but a gift of the land.

Déjà la Cour du Banc du Roi, qui avait conclu dans le sens confirmé plus tard par le Conseil Privé, avait dit même en présence de faits aussi probants que ceux de cette cause de Michaud v. Cité de Maisonneuve[22], par la bouche du juge-en-chef Lamothe :

Il nous faut trouver, dans le dossier, un abandon clair et non équivoque de ce terrain, sinon le droit de propriété doit être respecté; sinon nous devrons appliquer l'art. 407 du C. civ., qui dit que personne ne peut être force de cédar so propriété, si ce n'est moyennant une juste et préalable indemnité.

La donation était complète par la résolution du conseil de ville, résolution à laquelle M. Michaud avait donné son plein assentiment. M. Michaud ne peut reprendre aujourd'hui une propriété qu'il a abandonnée au public et à la ville de Maisonneuve.

Mais en dehors d'un cas de donation ou d'abandon ou de vente de gré à gré, les tribunaux de Québec n'ont jamais dispensé les corporations municipales

d'accomplir au préalable les formalités exigées par l'expropriation,

et ce, avec rigueur et sous peine de nullité. On peut référer à Deal v. The Corporation of Phillipsburg[23], La Corporation du canton Nelson v. Lemieux[24], Doyon v. La Corporation de la paroisse de Saint-Joseph[25], Holton v.

[Page 245]

Callaghan[26], Corporation du comté de Dorchester v. Collet[27], King v. Corporation de la partie nord du Township d'Irlande[28], Walsh v. Corporation de Cascapédiac[29].

Dans la cause de Compagnie du chemin de fer Central v. Legendre[30], la Cour du Banc du Roi a décidé que:

Un propriétaire a un recours direct par action pétitoire contre une compagnie de chemin de fer qui se serait mise en possession d'un terrain pour sa voie ferrée, sans le consentement du propriétaire et sans lui faire d'offre préalable pour le terrain ainsi occupé.

Et encore plus récemment, dans la cause de Canada & Gulf Terminal Ry. Co. v. McDonald[31] la même Cour du Banc du Roi a jugé:

La prise de possession d'un terrain par une compagnie de chemin de fer pour la construction de sa voie, avec la tolérance du propriétaire, ne prive ce dernier, tout au plus que des recours en complainte ou en réintégrande. Il conserve le droit d'exercer l'action pétitoire et de revendiquer le terrain, à défaut par la compagnie de l'indemniser selon la loi.

La Cour Suprême du Canada avait déjà approuvé ces principes dans son arrêt re City of Montreal v. Hogan[32], où l'honorable juge Taschereau, plus tard juge-en-chef, rendant le jugement unanime de la cour, dit à la page 5:

That the respondent has been illegally dispossessed of this property and that he is entitled to revendicate it cannot now be controverted by the appellants. A municipal corporation, it is needless to say, has no right to acquire real property except in the cases and in the manner provided by the statute from which it derives its powers.

Dans cette cause de City of Montreal v. Hogan (1)

the officers of the corporation had taken possession of the land, made a macadamized roadway over it, removed sidewalks, electric light poles, etc., back to the new line of the street, and opened it to public traffic;

cependant la décision fut (p. 5) :

We order judgment to be entered declaring the respondent proprietor of the property in question and ordering the appellant to put him, the respondent, in due possession thereof in the same state as it was when they took possession of it, within fifteen days after the signification of this judgment.

L'affirmation de l'honorable juge Taschereau, qu'une corporation municipale

has no right to acquire real property except in the cases and in the manner provided by the statute from which it derives its powers

pourrait se réclamer de ces deux articles du code civil:

399. Les biens appartiennent ou à l'état, ou aux municipalités et autres corporations, ou enfin aux particuliers.

[Page 246]

Ceux de la première espèce sont régis par le droit public ou par les lois administratives.

Ceux de la seconde sont soumis à certains égards pour leur administration, leur acquisition et aliénation, à des règles et formalités qui leur sont propres.

Quant aux particuliers, ils ont la libre disposition des biens qui leur appartiennent sous les modifications établies par la loi.

On voit la distinction que fait l'article, au sujet du "droit public", entre les biens de l'Etat et ceux des municipalités.

404. Les biens des municipalités et des autres corporations sont ceux à la propriété ou à l'usage desquels ces corps ont un droit acquis.

Aux deux articles du code civil, ajoutons les articles suivants de la charte de Montréal, qui étaient en vigueur lors de la prise de possession et n'ont été abrogés qu'en 1914, c'est-à-dire après la vente du shérif, en l'espèce:

419. La cité n'ouvrira, n'élargira et ne prolongera aucune rue, ruelle, voie ou place publique à moins qu'elle ne soit indiquée et projetée sur le dit plan général de la cité, ou ne soit comprise dans quelque modification ou addition faite à ce plan; ni à moins que deux mois au moins ne se soient écoulés depuis la confirmation par la cour supérieure ou par un juge d'icelle de tel plan, modification ou addition; et l'ouverture, l'élargissement ou le prolongement d'une rue, ruelle, voie ou place publique ne sera commencé, ou n'aura lieu, ou n'aura d'effet à moins que les formalités ci-après prescrites relativement au mode d'expropriation ne soient strictement, observées, ni à moins qu'il ne soit pourvu au coût de l'amélioration projetée et au paiement de tous les dommages-intérêts et indemnité qui pourront être payables ou exigibles, y compris les frais de toutes les procédures s'y rattachant.

420a. Toutes les rues privées ou ruelles ouvertes à l'usage du public, sont considérées comme immeubles imposables, tant qu'elles n'ont pas été formellement cédées à la cité et mises sous son contrôle.

En présence de ces dispositions expresses de sa charte et pour toutes les raisons que nous avons exposées, il nous paraît impossible de maintenir les prétentions de l'appelante. Le jugement de la Cour du Banc du Roi qui nous est soumis contient un ordre exactement semblable à celui de cette cour, dans la cause de la Cité de Montréal v. Hogan[33] ; et nous sommes d'avis que ce jugement est bien fondé.

Nous ne partageons pas la crainte exprimée, ici, par l'appelante à l'audition que ce jugement soit difficile d'exécution (art. 541 C.P.C.) sous prétexte qu'il ne définit pas suffisamment les bornes de la lisière revendiquée. La chose est bien simple: la cité de Montréal devra remettre ce dont elle s'est emparée. Nul mieux qu'elle ne doit savoir ce que cela comporte. D'ailleurs sa défense écrite (par. 7 et 9)

[Page 247]

indique qu'elle sait exactement de quoi il s'agit; et elle n'aura, pour compléter son information, qu'à référer soit

au plan préparé par John R. Barlow et daté novembre 1909

mentionné dans l'offre de Robert, soit au rapport de son arpenteur-géomètre, Charles Laberge, annexé à la résolution de son bureau des commissaires en date du 15 septembre 1910, soit au

plan produit par la défenderesse montrant la partie des lots en litige.

Cependant, nous ne devons pas oublier que l'effet du jugement est d'ordonner à la cité de Montréal de livrer à l'intimé la possession d'une lisière de terrain qui, dans le moment, fait physiquement partie d'une rue publique ; que, en plus, en vertu des statuts d'annexion, la cité est tenue de porter cette rue à sa largeur actuelle. Pour cette raison, nous croyons que la rigueur du jugement de la Cour du Banc du Roi peut être atténuée. Nous nous inspirons des principes posés par le Conseil Privé dans Parkdale v. West[34] et dont le très grand nombre pourraient trouver ici leur application. La Cour du Banc du Roi a fixé à quinze jours de la signification du jugement le délai pendant lequel la cité de Montréal devra évacuer le terrain et en livrer possession à l'intimé; elle avait le pouvoir d'étendre ce délai (arts. 579 et 610 C.P.C.). Nous nous servirons de ce pouvoir et accorderons un mois à l'appelante afin de lui permettre de conclure un arrangement avec l'intimé ou de procéder à l'expropriation requise pour obtenir légalement la possession et le titre à la propriété de la lisière de terrain en litige. Sauf cette modification, le jugement a quo doit être confirmé avec dépens.

Idington J.—The appellant never either bought or expropriated the land herein in question.

There were some negotiations between it and one Robert, the owner of the equity of redemption, but they never produced anything creating a final result conferring a right on appellant to enter on the premises. And when the mortgagees attempted to get at the supposed price, the appellant rightly denied that it owed anything in regard thereto.

It, therefore, in entering thereon, was a mere trespasser, and has never been anything else. Hence the whole of the fabric of claims it makes herein is unfounded.

[Page 248]

The facts upon which other points have been argued do not, under such circumstances, support the contention put forward by the appellant's counsel herein.

The cases of Dufresne v. Dixon[35], and Vézina v. Lafortune[36], have not the slightest resemblance in the fundamental facts in question therein to those of the facts in question herein. Hence they cannot affect my opinion above expressed, in the consideration of the facts as presented herein.

I may speak with deference as to the other leading point argued by counsel as to what constituted an hypothecary action, for my brother Mignault J. (better versed in the code than I am), seemed to be inclined to accept the meaning put forward by appellant's counsel.

Mr. Lafleur, arguing for respondent, convinced me that his view was the correct one. And unless the words "hypothecary action" are to be restricted in a way that I cannot maintain when considering their use in many articles of the code, I cannot agree with the pretensions of the appellant in that regard.

Hence, as I see them, the many other minor features presented by appellant's counsel cannot avail it. Indeed most, if not all, fall as soon as the relevant facts are correctly interpreted as, for example, the use of the words describing the land in question.

There has never been any legal highway constituted over that part of the land in question and hence the pretension that the respective descriptions, in the sheriff's deed to the Royal Trust Company, and by the latter to the respondent, in the respective references to the grantors in said deed to the Côte des Neiges road, as pretended to exist to-day, are wholly unfounded in law. Indeed the expressions used therein are quite incapable, I submit, of meaning anything else than the boundary of that road as it existed before the trespasses of the appellant.

Another question arises out of the pretensions of the meaning of the words "hypothecary sales," for I find, on reference to the Act enabling the appellant to act, and indeed requiring it to act, by way of expropriation in default of obtaining a title by negotiation expressly direct, such expropriation to be made by virtue of the Act, 54 Vict., c.

[Page 249]

38, and not by the terms of the charter of the appellant city.

When we turn to the Act we find it expressly recognizes the rights of hypothecary creditors, and that the amount fixed by arbitration must, if the title cannot be cleared up otherwise, be deposited with the prothonotary. See the article 5754s therein, and those preceding it in that statute.

I would dismiss the appeal with costs.

Appeal dismissed with costs.

Solicitors for the appellant: Jarry, Damphousse, Butler & St. Pierre.

Solicitors for the respondent: Elliott & David.



[1] [1924] Q.R. 37 K.B. 399.

[2] [1874] 27 L.C. Jur. 94.

[3] [1901] Q.R. 23 S.C. 16.

[4] [1905] Q.R. 14 K.B. 366.

[5] [1897] 27 Can. S.C.R. 309.

[6] [1018] Q.R. 95 S.C. 92.

[7] 27 Can. S.C.R. 309.

[8] Q.R. 14 K.B. 366.

[9] [1892] 21 Can. S.C.E. 499, at p. 512.

[10] [1865] 16 L.C.R. 267.

[11] [1889] 16 Can. S.C.R. 596.

[12] [1918] 56 Can. S.C.R. 246.

11 [1889] 16 Can. S.C.R. 596.

[13] 21 Can. S.C.R. 499, at p. 515.

[14] 16 Can. S.C.R. 596.

[15] 16 L.C.R. 267.

[16] 56 Can. S.C.R. 246.

[17] Q.R. 55 S.C. 92.

[18] [1882] 12 R.L. 575.

[19] [1919] 60 Can. S.C.R. 181, at p. 187.

[20] [1916] 59 Can. S.C.R. 508, at p. 526.

19 [1919] 60 Can. S.C.R. 181, at p. 187.

[21] [1923] 129 L.T. 417.

[22] [1919] Q.R. 30 K.B. 47.

[23] [1866] 16 L.C.R. 342.

[24] [1876] 2 Q.L.R. 225.

[25] [1873] 17 L.C. Jur. 193.

[26] [1875] 9 R.L. 665.

[27] [1884] 10 Q.L.R. 63.

[28] Q.R. 2 K.B. 266.

[29] [1896] Q.R. 7 K.B. 290.

[30] [1885] 11 Q.L.R. 106.

[31] [1913] Q.R. 23 K.B. 299.

[32] [1900] 31 Can. S.C.R. 1.

[33] 31 Can. S.C.R. 1.

[34] [1887] 12 App. Cas. 602.

[35] 16 Can. S.C.R. 596.

[36] 56 Can. S.C.R. 246.

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