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COUR SUPRÊME DU CANADA

 

Référence : R. c. Reilly, 2021 CSC 38

 

 

Appel entendu : 14 octobre 2021

Jugement rendu : 14 octobre 2021

Dossier : 39531

 

Entre :

 

Sa Majesté la Reine

Appelante

 

et

 

Liam Reilly

Intimé

 

Traduction française officielle

 

Coram : Le juge en chef Wagner et les juges Moldaver, Karakatsanis, Côté, Brown, Rowe, Martin, Kasirer et Jamal

 

Jugement unanime lu par :

(par. 1 à 4)

 

Le juge Moldaver

 

Note : Ce document fera l’objet de retouches de forme avant la parution de sa version définitive dans le Recueil des arrêts de la Cour suprême du Canada.

 

 

 

 


 

Sa Majesté la Reine                                                                                       Appelante

c.

Liam Reilly                                                                                                           Intimé

Répertorié : R. c. Reilly

2021 CSC 38

No du greffe : 39531.

2021 : 14 octobre.

Présents : Le juge en chef Wagner et les juges Moldaver, Karakatsanis, Côté, Brown, Rowe, Martin, Kasirer et Jamal.

en appel de la cour d’appel de la colombie‑britannique

                    Droit constitutionnel — Charte des droits — Fouilles, perquisitions et saisies — Réparation — Exclusion de la preuve — Policiers se rendant à la résidence de l’accusé et y entrant illégalement par une porte arrière non verrouillée afin de l’arrêter pour vol qualifié et pour des infractions liées aux armes à feu — Policiers procédant à une fouille des lieux à des fins sécuritaires et obtenant subséquemment un mandat de perquisition basé en partie sur des observations effectuées durant cette fouille — Juge du procès reconnaissant que la conduite des policiers a violé la Charte mais concluant à la validité du mandat et à l’admissibilité de la preuve et déclarant l’accusé coupable — Majorité de la Cour d’appel souscrivant à la validité du mandat mais statuant que le juge du procès a fait erreur en considérant que les comportements des policiers respectant la Charte atténuaient leur conduite attentatoire à celle‑ci et en effectuant une analyse compartimentée des facteurs afin de décider s’il y avait lieu d’écarter la preuve — Majorité écartant la preuve, annulant les déclarations de culpabilité et ordonnant la tenue d’un nouveau procès — Ordonnance intimant la tenue d’un nouveau procès confirmée.

Jurisprudence

                    Arrêt mentionné : R. c. Grant, 2009 CSC 32, [2009] 2 R.C.S. 353.

Lois et règlements cités

Charte canadienne des droits et libertés , art. 8 , 24(2) .

                    POURVOI contre un arrêt de la Cour d’appel de la Colombie‑Britannique (les juges Willcock, Fenlon et Griffin), 2020 BCCA 369, 397 C.C.C. (3d) 219, 70 C.R. (7th) 175, [2020] B.C.J. No. 2095 (QL), 2020 CarswellBC 3250 (WL), qui a infirmé les déclarations de culpabilité prononcées contre l’accusé et qui a ordonné un nouveau procès. Pourvoi rejeté.

                    Mark K. Levitz, pour l’appelante.

                    William E. Jessop, pour l’intimé.

                    Version française du jugement de la Cour rendu oralement par

[1]               Le juge Moldaver — Nous sommes d’avis de rejeter le présent pourvoi, essentiellement pour les motifs exhaustifs exposés par la juge Griffin au nom des juges majoritaires de la Cour d’appel. Nous convenons que le juge du procès a fait erreur dans son analyse fondée sur le par. 24(2)  de la Charte canadienne des droits et libertés  en considérant comme un facteur atténuant les comportements policiers qui respectaient la Charte  (2018 BCPC 362).

[2]               Nous convenons également que le juge du procès a fait erreur en procédant erronément à la mise en balance globale — la question de savoir si l’admission de la preuve est susceptible de déconsidérer l’administration de la justice — dans le cadre des deux premiers facteurs énoncés dans R. c. Grant, 2009 CSC 32, [2009] 2 R.C.S. 353. Le texte de l’arrêt Grant est clair : cette mise en balance se fait à la fin (par. 85). Les juges doivent d’abord décider si chacun des trois facteurs milite en faveur de l’admission ou de l’exclusion de la preuve avant de se demander si — eu égard à l’ensemble des facteurs — l’admission de la preuve est susceptible de déconsidérer l’administration de la justice. Procéder à la mise en balance globale dans le cadre des deux premiers facteurs énoncés dans Grant a pour effet d’affaiblir tout pouvoir d’exclusion que pourraient avoir ces facteurs. Ce type d’analyse compromet l’objectif et l’application du par. 24(2).

[3]               Avec égards, toutefois, nous ne pouvons souscrire à la conclusion des juges majoritaires de la Cour d’appel selon laquelle le juge du procès a adéquatement tenu compte de l’ensemble de la conduite attentatoire pertinente de l’État dans le cadre du premier facteur énoncé dans Grant. Le premier juge a pris en considération les comportements attentatoires de l’État liés à seulement deux des trois violations de l’art. 8. L’omission de considérer la conduite de l’État qui a entraîné la troisième violation — la fouille des lieux à des fins sécuritaires — constituait une erreur. Indépendamment de la question de savoir si la troisième violation a ou non été causée par les deux premières, et du fait qu’elle a été considérée nécessaire dans la foulée de l’entrée illicite de l’agent Sinclair, il s’agissait néanmoins d’une violation des droits garantis à M. Reilly par l’art. 8  de la Charte  et elle doit être examinée dans le cadre du premier facteur énoncé dans Grant. Les juges qui président des procès ne peuvent choisir quelles sont les conduites attentatoires de l’État pertinentes à prendre en considération.

[4]               Le juge du procès a commis des erreurs qui ont obligé les juges majoritaires de la Cour d’appel à procéder à une nouvelle analyse fondée sur le par. 24(2). À notre avis, nous ne sommes pas incompétents pour examiner les erreurs dont serait entachée la nouvelle analyse qu’ont effectuée les juges majoritaires. Nous ne voyons aucune raison de modifier leur nouvelle analyse. En conséquence, nous sommes d’avis de rejeter le pourvoi, et de confirmer l’exclusion de la preuve et la tenue d’un nouveau procès.

                    Jugement en conséquence.

                    Procureur de l’appelante : Procureur général de la Colombie‑Britannique, Vancouver.

                    Procureurs de l’intimé : Jessop Criminal Law, Vancouver.

 

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