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Supreme Court of Canada

Will—Substitution—Legacy of usufruct to grandchildren—Right by substitutes to dispose by will under certain conditions—Lapsing of such legacy—Interpretation—Intention of testator—Arts. 756, 831, 893, 944, 956 C.C.

By his will in authentic form one L. C. Gravel bequeathed to his wife the usufruct of the remainder and residue of all his estate; and by clause four of his will he bequeathed, subject to his wife's right of usufruct, the remainder and residue of the same property to his daughter, Maria Gravel, wife of Louis Joseph Lajoie, to hold and enjoy as institute, subject to the obligation of delivering over the ownership thereof to her issue in the first degree. By clause nine of his will he disposed as follows: "It is my will and intention that any

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substitute inheriting the ownership of my property, in the event of the opening of his. legacy, be placed in possession thereof as actual owner only when he has attained the age of thirty, and that until then he have only the use and usufruct thereof, without power to sell, pledge or alienate any part of his share of capital or of realty, while being allowed to dispose thereof by will, in the event of death before attaining such age providing it be in favour of his children of full age or, in default thereof, in favour of any one of the substitutes of his choice under the said substitution, while nevertheless having the right to bequeath the right of enjoyment of his share to his consort, but during widowhood only, whether he have issue or not, and in default of such a will, the share of any of the said substitutes under the said substitution dying while of age but under thirty shall devolve to his children or, in default of children, to the other substitutes under the said substitution, according; to the conditions hereinbefore provided in the event of the decease under age of any substitute under the said substitution without leaving issue of full age." L. C. Gravel's wife died in Montreal on August 16th, 1900, and her daughter Maria Gravel also died in Montreal on September 16th, 1916. By this last decease the substitution created by L. C. Gravel's will became open and the property thereby affected devolved to the seven children of Maria Gravel. Marguerite Lajoie., one of these children, who was one of the substitutes, made on December 13th, 1919, at the age of 24 years and some months, a will in authentic form whereby she disposed of the estate she inherited from her grandfather, in the following terms: "3. Desiring to avail myself of the rights conferred upon me by clause nine of the solemn will of my grandfather, the late Louis Charles Gravel, * * * to dispose by will of my share in his estate as one of the substitutes under the said will, I give and bequeath to my above-named husband the use and usufruct during his lifetime, or until his remarriage, of my share in the said estate of my late grandfather above named, as one of the substitutes under the said will, and to my two sisters Hortense Lajoie and Blanche Lajoie, in equal parts, the ownership of my said share in the said estate, subject to the said usufruct of my said husband during his lifetime or until his remarriage." When she made her will Marguerite Lajoie was childless; and it is only on August 21st, 1925, that is at the age of thirty years and nearly ten months, that she gave birth to her first child, Louise Clerk. Marguerite Lajoie, left a widow in 1926 at the age of thirty-two, married the appellant at the age of thirty-five and died at the age of forty leaving no other will but the one above mentioned. Her lawful heirs, that is, her daughter Louise Clerk and her husband Oscar Benoit, accepted her succession. In his own name, as well as in his capacity of tutor to his minor daughter, the appellant asked, that the bequest to the respondent be declared null and void.

Held, reversing the judgment of the Court of King's Bench (Q.R. 68 K.B. 117), that clause 3 of Marguerite Lajoie's will was to take effect only in the event of her dying under the age of thirty without leaving any children; and that, this contingency not having occurred, the legacy dependent upon it remained without effect: it lapsed from the moment that the condition to which it was subject was fulfilled and on Marguerite Lajoie's attaining the age of thirty.—In order to determine "what was the real intention of" the testatrix, a "fair and literal meaning" must be given to the terms and expressions

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which she used to manifest it (Auger v. Beaudry, [1920] A.C. 1010); and, in doing so, the conclusion must be that the testatrix did not intend to avail herself of the unlimited right to dispose by will and the general power conferred upon her by the Civil Code, but that she only wished to "avail herself of the rights" conferred upon her by her grandfather's will, i.e., that she wished merely to provide for the contingency arising in the event of her dying before the age of thirty years.

APPEAL from the judgment of the Court of King's Bench, appeal side, province of Quebec[1], reversing the judgment of the Superior Court, McDougall J., and dismissing the appellant's action.

The material facts of the case and the question at issue are stated in the above head-note and in the judgment now reported.

Gustave Mouette K.C. for the appellant.

Aldéric Laurendeau K.C. for the respondent.

The judgment of the Court was delivered by

Rinfret J.—L'appelant en appelle à cette Cour d'un jugement de la Cour du Banc du Roi (1) qui, par une majorité des juges, a rejeté son action pour faire déclarer nul et de nul effet un certain legs fait en faveur de l'intimée.

La Cour Supérieure avait maintenu l'action et avait fait droit à la demande de l'appelant.

Voici dans quelles circonstances la question se présente:

M. Louis-Charles Grave], en son vivant marchand de Montréal, par son testament en forme authentique a légué à son épouse l'usufruit du reste et du résidu de tous ses biens meubles et immeubles, droits et actions mobiliers et immobiliers.

Par la clause quatrième de son testament il a légué, sujet au droit d'usufruit de son épouse, le reste et résidu des mêmes biens à sa fille, Maria Gravel, épouse de Louis Jos. Lajoie, pour par elle en jouir comme grevée de substitution à la charge d'en rendre et remettre la propriété à ses enfants au premier degré, sans en exclure par là les enfants de ceux d'entr'eux alors prédécédés et ayant laissé des enfants pour les représenter par souche.

Par la clause neuvième de son testament il a ordonné ce qui suit:—

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Je veux et entends que tout appelé à recueillir la propriété de mes biens, advenant l'ouverture de son legs, n'en soit mis en possession par lui-même qu'à l'âge de trente ans, et que jusque-là, il n'en ait que la jouissance et usufruit, sans pouvoir vendre, engager ou aliéner aucune partie de sa, part de capital ou de biens-fonds, tout en pouvant disposer par testament, au cas de décès avant tel âge, pourvu que ce soit en faveur de ses enfants atteignant l'âge de majorité, on à leur défaut, en faveur d'aucun des appelés à la dite substitution de son choix, tout en ayant la liberté de léguer le droit de jouissance de sa part à son conjoint, mais ce pendant viduité seulement, qu'il ait laissé des enfants ou non, et à défaut de testament dans les conditions ci-dessus, la part d'aucun des dits appelés à la dite substitution décédant en âge de majorité, mais avant d'avoir atteint l'âge de trente ans, sera recueillie par ses enfants, ou à leur défaut, par les autres appelés à la dite substitution, aux conditions ci-dessus prévues pour le cas du décès en minorité d'aucun appelé à la dite substitution sans laisser d'enfants atteignant l'âge de majorité.

L'épouse de M. Gravel est décédée à Montréal, le 16 août 1900. Sa fille, Maria Gravel, est aussi décédée au même lieu, le 16 septembre 1916. Par ce dernier décès la substitution créée par la testament de M. Gravel s'est trouvée ouverte et les biens qui en faisaient l'objet ont été recueillis par les sept enfants de Maria Gravel.

L'une des enfants de Maria Gravel et l'une des appelés à la substitution, alors qu'elle n'était âgée que de vingtquatre ans et quelques mois, fit un testament en la forme authentique; elle y disposait des biens lui venant de son grand-père, dans les termes suivants:

3. Voulant user des droits que me confère l'article neuf du testament solennel de mon grand-père, feu M. Louis Charles Gravel, reçu devant M. Narcisse Pérodeau et son confrère, notaires, le 30 décembre 1892, de disposer par testament de ma part dans les biens de sa succession, comme l'une des appelés à la substitution créée en vertu du dit testament, je donne et lègue à mon époux susnommé, la jouissance et l'usufruit durant sa vie, ou jusqu'à son convoi en secondes noces, de ma part dans les biens de la dite succession de feu mon grand-père susnommé, comme l'une des appelés à la substitution créée en vertu dudit testament et la propriété de ma dite part dans les dits biens, par parts égales, à mes deux sœurs Hortense Lajoie et Blanche Lajoie, sujet au dit usufruit de mon dit époux durant sa vie, ou jusqu'à son convoi en secondes noces.

Par ce même testament elle instituait son époux, Maurice Clerk, son légataire résiduaire universel, mais ce legs s'est trouvé caduc parce que son époux l'a, prédécédé.

Au moment où elle fit son testament, Marguerite Lajoie n'avait pas d'enfants; elle n'en a pas eu avant l'âge de trente ans. Ce n'est que le vingt et un août 1925, savoir à l'âge de trente ans et près de dix mois que son enfant, Louise Clerk, lui est née.

Devenue veuve en 1926, à l'âge de trente-deux ans, Marguerite Lajoie, s'est remariée à l'âge de trente-cinq ans

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avec l'appelant, et elle est décédée à l'âge de quarante ans sans autre testament que celui dont il vient d'être question et qui porte la date du treize décembre 1919. Ses héritiers légitimes, savoir, sa fille, Louise Clerk, et son mari, Oscar Benoit, ont recueilli sa succession.

Tant en son nom personnel que comme tuteur à Louise Clerk qui est mineure, Oscar Benoit, l'appelant, demande que le legs à l'intimée soit déclaré nul et sans effet.

Nous n'avons plus à nous occuper des intérêts de Hortense Lajoie qui a prédécédé sa sœur Marguerite. La seule intéressée est maintenant mademoiselle Blanche Lajoie.

Suivant nous, la décision de cette cause dépend uniquement de l'intention qu'avait la testatrice lorsqu'elle a inséré dans son testament la clause troisième que nous avons reproduite ci-dessus.

Il n'y a pas de doute qu'en sa qualité de grevée Marguerite Lajoie pouvait, durant la substitution, disposer par testament de son droit éventuel aux biens substitués, sujet au manque d'effet par caducité (Art. 956 C.C.).

Comme grevée elle possédait pour elle-même le titre de propriétaire (Art. 944 C.C.). En vertu de la loi, elle possédait la liberté illimitée de tester (Art. 831 C.C.). Elle aurait pu faire un testament en vertu duquel elle léguait tous ses biens. Ce testament aurait pris effet après son décès (Art. 756 C.C.). Et, pourvu qu'elle fût décédée après avoir atteint l'âge de trente ans, les biens venant de la succession de son grand-père eussent été compris parmi ceux qu'elle aurait ainsi légués. La naissance de son enfant après qu'elle avait atteint l'âge de trente ans n'aurait pas par elle-même opéré la révocation de ce testament (Art. 893 C.C.).

Mais la solution de la question qui nous est soumise ne dépend pas des pouvoirs généraux ou de la capacité légale de Marguerite Lajoie. Nous n'avons pas à nous demander ce qu'elle aurait pu faire. Ce que nous avons à rechercher c'est ce qu'elle avait l'intention de faire. Et nous devons trouver cette intention à l'aide des termes et des expressions qu'elle a employés pour la manifester.

En effet, comme le dit Lord Buckmaster, rendant le jugement du Conseil Privé dans la cause de Auger v. Beaudry[2]:

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It is now recognized that the only safe method of determining what was the real intention of a testator is to give the fair and literal meaning to the actual language of the will.

La clause que nous étudions debute par ces mots:

Voulant user des droits que me confère l'article neuf du testament solennel de mon grand-père, feu M. Louis Charles Gravel, reçu devant M. Narcisse Pérodeau et son confrère, notaires, le 30 décembre 1892, de disposer par testament, de ma part dans les biens de sa succession, comme l'une des appelés à la substitution créée en vertu du dit testament.

Cette phrase est bien claire. La testatrice n'entend pas user de la liberté illimitée de tester et du pouvoir général qui lui sont octroyés par le Code Civil; elle veut simplement "user des droits" que lui confère le testament de son grand-père. En d'autres termes, elle veut seulement pourvoir à ce qui arriverait au cas où elle décéderait avant l'âge de trente ans—dans les limites qui lui sont assignées par le testament de son grand-père.

En vertu de ce testament, si elle meurt avant d'avoir atteint l'âge de trente ans la propriété de la part des biens de son grand-père doit aller à ses enfants; et, à défaut d'enfants, aux autres appelés à la substitution. Elle a, cependant, deux droits qu'elle peut exercer par testament:

Premièrement: elle peut léguer le droit de jouissance de sa part à son conjoint pendant viduité;

Deuxièmement: elle a le droit de choisir et d'indiquer parmi les appelés ceux qui recueilleront la propriété, à défaut d'enfants.

Au moment où elle fait la disposition contenue dans la clause troisième, elle n'a pas d'enfants. Elle procède donc à exercer les droits qui lui résultent du testament de son grand-père et qui sont compatibles avec l'état de choses existant à ce moment-là.

Tout ce qu'elle entend faire, d'après les termes mêmes de la clause en litige, c'est se servir des droits qui lui sont conférés par son grand-père pour léguer à son époux l'usufruit de sa part qu'il n'aurait pas eu autrement, et pour faire le choix des appelés à qui elle entend léguer la propriété.

Mais comme elle le dit: elle veut simplement "user des droits" qui lui sont conférés par le testament. Elle indique donc clairement qu'elle entend se servir de ses droits dans les limites qui lui sont assignées par la clause neuf du testament du grand-père et que les legs qu'elle

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fait ainsi sont nécessairement subordonnés aux conditions prévues à ce testament, c'est-à-dire, son décès avant d'avoir atteint l'âge de trente ans et sans laisser d'enfants qui atteindraient l'âge de majorité.

Bien respectueusement nous croyons que c'est bien là le sens qui se dégage des expressions que Marguerite Lajoie a employées et nous ne pouvons y voir l'intention de se servir de son pouvoir général de tester. Il en résulte, suivant nous, que la clause devait prendre effet au cas seulement où se rencontreraient les conditions qu'elle prévoit, c'est-à-dire, si Marguerite Lajoie mourait avant trente ans sans laisser d'enfants.

Comme l'événement prévu ne s'est pas produit le legs auquel il était subordonné est resté sans effet. Il est devenu caduc du moment que la condition à laquelle il était soumis s'est accomplie et dès que Marguerite Lajoie eut atteint l'âge de trente ans.

L'appelant nous dit:

Ce n'est pas le legs qui devient inefficace. Marguerite Lajoie avait toute capacité de disposer de ses biens, et en ce qui concerne ceux qui lui venaient de son grand-père, la restriction que le testament de ce dernier lui imposait était simplement que la disposition qu'elle en ferait resterait sans effet au cas où elle décéderait avant d'avoir atteint l'âge de trente ans.

C'est également ce que paraît avoir décidé la majorité de la Cour du Banc du Roi.

Mais, à notre humble avis, cette interprétation ne tient aucun compte de la phrase introductive de la clause 3 du testament.

Nous ne perdons pas de vue que la testatrice est décédée plusieurs années après avoir atteint l'âge de trente ans et sans avoir révoqué son testament. L'intimée voudrait que nous trouvions là une intention de ratifier le testament, mais nous ne voyons pas comment ce fait peut aider à soutenir la cause de l'intimée. En admettant que le silence de la testatrice pendant les années subséquentes de sa vie ait eu pour effet de confirmer la disposition qu'elle avait faite dans le clause 3 de son testament, cette confirmation ne peut s'entendre que de la clause telle qu'elle a été redigée et telle qu'elle doit être interprétée. Si l'interprétation que nous soumettons ci-dessus est la bonne, toute confirmation ultérieure, surtout toute confirmation tacite, ne saurait modifier le sens originaire de la clause.

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Par ces motifs nous croyons que l'appel doit être maintenu et que le jugement de première instance doit être rétabli avec dépens.

Appeal allowed with costs.

Solicitors for the appellant: Monette, Filion & Meighen.

Solicitors for the respondent: Laurendeau & Laurendeau.



[1] (1939) Q.R. 68 K.B. 117.

[2] [1920] A.C. 1010, at 1014.

 You are being directed to the most recent version of the statute which may not be the version considered at the time of the judgment.